On croyait avoir tout vu de Lara Croft, sacrée l'an dernier « héroïne de jeu vidéo la plus vendue » par le livre des records Guiness et dont la franchise Tomb Raider s'est vendue à plus de 63 millions d'exemplaires. Eidos-Montréal et Crystal Dynamics, les studios derrière le nouvel épisode qui sera lancé ce vendredi, n'avaient pas dit leur dernier mot : Shadow of the Tomb Raider propulse l'icône vers de nouveaux sommets.

De mémoire de joueur, on a rarement eu entre les mains un jeu aussi complet, fignolé et enrichi sur tous les plans. Shadow of the Tomb Raider, c'est d'abord une orgie graphique qui se balade de villages mexicains et péruviens jusque dans des ruines mayas, en passant par la jungle amazonienne, des tunnels, des couloirs sous l'eau, des affrontements avec de méchants pillards. Le graphisme est superbe, foisonnant de détails, très coloré dès la scène d'ouverture dans un village mexicain où on célèbre la fête des Morts jusqu'à la cité cachée de Paititi, « le plus grand carrefour (hub) jamais créé pour un jeu Tomb Raider », précise le studio.

Au-delà du combat

Comme le veut la tradition depuis la création de Lara Croft en 1996, le but ici est de trouver des reliques dans des cités perdues. Cette fois, l'héroïne découvre d'entrée de jeu une dague maya dont la profanation a déclenché l'apocalypse. Aidée par son partenaire Jonah Maiava, elle se heurtera aux ennemis habituels, les Trinitaires, des brutes sans pitié menées par le docteur Dominguez. Il faudra combattre les méchants qu'on devine responsables de la mort de son père Richard, soit en les éliminant en douce ou en tirant dans le tas avec tout ce dont dispose Lara. Selon les tableaux, on devra se contenter de ses mains nues, d'un couteau élimé, d'un arc ou d'un arsenal digne de Rambo.

Bien qu'importants pour le scénario, ces combats ne représentent heureusement qu'une petite portion de l'aventure. Le reste est constitué de quêtes pour retrouver des trésors, de dialogues avec les personnages, de cueillette dans la jungle pour trouver des herbes, peaux, branches qui vont servir à confectionner des armes ou à se soigner. Aux moments-clés, on se heurtera à des énigmes qu'il faudra résoudre pour franchir une chute, atteindre une caverne ou ouvrir une porte. Elles ne sont pas faciles, et il nous a fallu de nombreux essais pour finalement trouver le bon passage, la disposition exacte des objets ou l'angle de saut pour ne pas finir embroché.

À travers ces aventures, elle devra assumer son destin, devenir une pilleuse de tombes, la «Tomb Raider».

Aux petits soins

Ça, c'est la trame de fond, bien familière aux millions de joueurs qui ont fréquenté Lara Croft depuis ses débuts. La mécanique de jeu est celle qui a présidé à la renaissance de la franchise, le « reboot » initié en 2013 et mené par Crystal Dynamics et le studio Eidos-Montréal. Mais ceux qui ont connu le dernier épisode lancé en 2015, Rise of the Tomb Raider, apprécieront l'évolution : Lara Croft acquière avec Shadow of the Tomb Raider une profondeur inégalée. Lors d'une rencontre avec les artisans d'Eidos-Montréal le printemps dernier, nous avions été frappés par leur attachement à ce personnage, dont ils ont décrit les tourments et la transformation comme s'il s'agissait d'une proche parente. Après une dizaine d'heures dans ce nouvel épisode, on ne peut que saluer le soin apporté à étoffer Lara, prise entre son désir constant d'exploration et ses remords, consciente de son narcissisme, apeurée puis implacable.

On sent l'amour de ses concepteurs quand, par exemple, on quitte momentanément la jungle pour retrouver Lara enfant, dans le manoir de son père, jouant à l'exploratrice qui doit sauver la Reine blanche. Ou dans l'interaction avec Jonah, fiable et solide comme un roc mais sans pitié avec les obsessions de l'héroïne.

Pour bien servir le personnage, on a également enrichi la mécanique, d'abord en proposant quatre niveaux de difficulté, qui peuvent être différents pour les trois aspects du jeu, soit les casse-tête, l'exploration et les combats. Les compétences, les armes et les tenues s'améliorent au fur et à mesure des découvertes, et il faut utiliser les découvertes pour fabriquer différentes pièces d'équipement.

Facile de se perdre

Dans les modes le plus faciles, les indications apparaissent quand on déclenche l'Instinct de survie, les ennemis et animaux sauvages sont moins tenaces et les obstacles plus faciles à franchir. Il faudra malgré tout de longues recherches, et de nombreux essais infructueux pour traverser les épreuves.

C'est le revers de la médaille d'un graphisme si riche dont on a peaufiné tous les détails : il y en a beaucoup, justement, et on peut se perdre facilement sans arriver à identifier celui qui est important. Un exemple : seules certaines plantes dans la jungle ont un intérêt pour soigner ou améliorer les perceptions de Lara Croft, mais il est difficile de les distinguer sans recourir à l'Instinct de survie ou de tomber dessus par hasard. Dans les casse-tête, il faudra tout essayer avant de trouver la bonne combinaison, les éléments-clés n'étant pas particulièrement évidents. Et même si on a mis au point des codes, par exemple des lignes blanches sur les rochers qu'on peut gravir, on peut tourner en rond longtemps avant de détecter le passage ou l'entrée d'un temple.

C'est probablement le prix à payer pour avoir un jeu surprenant et dont le scénario est si riche. Et on le paie avec plaisir.

Titre : Shadow of the Tomb Raider

Développeurs: Square Enix, Eidos-Montréal, Crystal Dynamics

Consoles : Xbox One, PlayStation 4, PC

Prix : 79,99$ (édition standard)

Note :  5 sur 5