Dans les gradins, des milliers de gens de l'industrie intrigués. Sur l'internet, d'innombrables amateurs de jeux vidéo impatients. Et sur la scène, seul, le joueur qui subit toute la pression.

À l'Electronic Entertainment Expo (E3), les jeux les plus attendus de l'année sont tous présentés en conférence de presse aux médias et aux gens de l'industrie, parfois sous forme de bande-annonce préenregistrée. Mais parfois, aussi, il faut jouer la démo pour vrai. Le joueur du démo fixe alors le sol (il joue sur une télé placée sur le plancher de la scène), l'air impassible, concentré sur sa tâche qui n'a rien d'amusant.

«C'est un peu inhumain. On te demande de jouer à la perfection et de montrer le jeu parfaitement», dit Alexandre Parizeau, producteur senior de Splinter Cell Blacklist, qui a joué pendant six minutes durant la présentation de Microsoft lundi matin. «Tu ne peux pas jouer de façon normale, car tu es à la fois le joueur et le caméraman», dit Maxime Béland, directeur créatif de Splinter Cell Blacklist, qui accompagnait Alexandre Parizeau sur scène pour faire la narration du démo.

Philippe Ducharme, producteur associé d'Assassin's Creed III, a joué les scènes de bataille navale à la conférence de Sony lundi soir pendant que le directeur créatif, Alex Hutchinson, s'occupait de la narration. «Les bateaux ennemis réagissent différemment chaque fois, dit Philippe Ducharme. Il ne faut pas faire de mouvements brusques et il faut rester calme.»

Longue préparation

En vue du E3, le joueur en question - toujours un membre important de l'équipe de production - se prépare pendant plusieurs semaines. «On joue un peu tous les jours de toute façon, mais on joue plus intensément au cours des deux semaines avant le E3», dit Alexandre Parizeau, Montréalais d'origine qui travaille aujourd'hui pour Ubisoft à Toronto. «J'ai pratiqué tous les jours depuis un mois, dit Philippe Ducharme, de l'équipe d'Assassin's Creed III. Plus tu approches, plus tu te sens en contrôle. On enlève aussi tous les éléments les plus risqués du démo.»

Au même titre que des athlètes, les habitudes des joueurs de démos varient. Le week-end précédant la présentation des deux démos d'Ubisoft, Philippe Ducharme n'a pas touché une fois à sa manette de jeu, tandis qu'Alexandre Parizeau a répété le parcours de son agent secret Sam Fisher une cinquantaine de fois - au point où il s'est levé lundi matin avec un pouce droit endolori. «Je l'utilise moins habituellement, mais je voulais tellement que la démo soit parfaite», dit Alexandre Parizeau.

Peu importe leurs habitudes, vaut mieux respecter LA règle d'or d'un joueur de démo au E3: s'entraîner dans des conditions les plus identiques possible à sa prestation. Maxime Béland sourit en se rappelant la démo de Splinter Cell Conviction au E3 en 2009. «La petite télé sur la scène était très loin de nous, dit-il. Comme Alexandre ne laisse rien au hasard, on a tassé la télé à l'hôtel sur le mur au fond et Alexandre jouait debout le dos collé à la porte de la chambre pour être le plus loin possible de la télé...»