Longtemps assimilés à des passe-temps sommairement réalisés, les jeux vidéo gratuits sur internet voient leur popularité grandir, grâce à des budgets de plus en plus conséquents et un modèle économique fondé sur des micro-transactions.

Plutôt que de payer, comme c'est traditionnellement le cas, le jeu en lui-même ou un abonnement, le joueur peut ainsi essayer une production sans rien débourser, mais il a la possibilité d'acquérir des objets à l'unité pour personnaliser son héros par exemple.Ce modèle, baptisé «free-to-play», est originaire de Corée du Sud et de Chine, deux territoires difficiles d'accès pour les créateurs en raison du piratage, et parvient à séduire à séduire un public croissant en occident.

«Nous enregistrons plus de 200 000 inscriptions par jour sur notre portail, qui compte déjà plus de 110 millions de membres», explique Simon Guild, président de l'allemand Bigpoint, l'un des principaux acteurs du secteur en Europe.

Disponibles pour des sommes allant généralement jusqu'à quelques euros, les articles proposés, comme des armures ou des épées, sont facultatifs et le fait de ne pas les posséder n'entrave nullement la progression du joueur.

«Environ 80% des joueurs n'achètent rien dans nos jeux. Il en reste donc 20% qui dépensent en moyenne une vingtaine d'euros par mois», ajoute M. Guild. Pour ce faire, ils doivent créditer leur compte via l'un des nombreux moyens à leur disposition, par carte de crédit ou SMS notamment.

Pour certains, «le niveau de dépenses peut monter jusqu'à 500 euros par mois», renchérit Thomas Bidaux, PDG du cabinet d'étude sur le jeu en ligne Ico Partners.

La publicité n'a, pour sa part, pas les faveurs de la plupart de ces sites internet car «elle ne rapporte pas beaucoup et occuperait un espace qui sert à promouvoir d'autres jeux», souligne le président de Bigpoint.

Preuve de l'arrivée à maturité de ce marché, qui génère près de 500 millions d'euros de chiffre d'affaires en Europe par an selon M. Bidaux, les budgets de développement atteignent des niveaux record. Le prochain titre majeur de Bigpoint, Poisonville, aura ainsi coûté un million d'euros.

Genre emblématique, le jeu de rôle en ligne massivement multi-joueurs (MMORPG) n'échappe pas au phénomène.

«Notre prochain titre, Allods Online, sur lequel travaillent 150 personnes actuellement, a un budget d'environ douze millions de dollars», affirme Vincent Douvier, producteur du jeu au sein de l'éditeur Gala Networks Europe.

Selon lui, la principale difficulté réside dans la manière dont est fixé le prix des objets: "il faut trouver la bonne fourchette pour susciter l'envie sans rebuter le joueur".

Jeux gratuits et payants ne sont néanmoins pas totalement incompatibles, juge Thomas Bidaux, car «le free-to-play permet de faire grandir le marché et d'attirer de nouveaux joueurs».

D'autres imaginent même à l'avenir un mélange entre plusieurs modèles économiques afin de générer davantage de revenus.

«Les grosses sociétés habituées à des jeux avec un abonnement mensuel commencent à prendre le train en marche. À moyen terme, nous envisageons un modèle fondé sur un abonnement, des contenus téléchargeables ou des comptes premium, voire une subtile alchimie entre certaines de ces solutions», prédit Sébastien Pacetti, chef de produit pour l'éditeur Frogster Online.