Caméras de surveillance dans les couloirs, double sas de sécurité et strictes clauses de confidentialité: les 250 employés d'Ubisoft qui ont créé le jeu vidéo Avatar ont vécu pendant deux ans dans un véritable bunker... au troisième étage du studio montréalais du géant français.

«Même moi je ne peux pas entrer sans être accompagnée», lance une porte-parole d'Ubisoft en train d'attendre à la porte du camp retranché où le film de James Cameron, dont la sortie est très attendue, entame une vie parallèle sous forme de jeu vidéo.Le réalisateur canadien n'avait pas tourné de fiction pour le cinéma depuis 1997 et «Titanic», le plus grand succès de l'histoire du cinéma, vainqueur de 11 Oscars.

Pas question donc de laisser filtrer quoi que ce soit sur «Avatar» avant sa sortie sur les écrans du monde entier le 18 décembre, dans la foulée du jeu.

Une salle entière a été isolée du reste du studio, un ancien bâtiment industriel où travaillent quelque 2.000 personnes. Tout ce qui entre et sort est scrupuleusement contrôlé. Internet a même été coupé vers l'extérieur.

Mais une fois les contrôles franchis, l'austère hypersécurité fait place à une vaste pièce à mi-chemin entre salle de jeux d'arcade pour grands enfants et laboratoire de recherche californien. Ici, un drapeau de pirate flotte stoïquement au-dessus d'un bureau. Plus loin, des canettes de sodas trônent sur un bureau aux côtés de figurines de super-héros et d'ouvrages scientifiques sur la motricité des animaux.

Casques sur les oreilles, des trentenaires, en grande majorité des hommes, s'affairent sur leurs ordinateurs. Certains, enfoncés dans leurs fauteuils, une manette de console vidéo en mains, testent l'une des trois versions du jeu. D'autres pianotent sur leur clavier des réglages de dernière minute.

Premier jeu vidéo de grande envergure disponible en 3D, à condition d'avoir une télévision adaptée, Avatar se déroule sur la luxuriante et magique planète Pandora. Au milieu d'une immense forêt tropicale imaginaire, un conflit oppose une population tribale indigène à un consortium intergalactique, basé sur Terre et cherchant des sources d'approvisionnement en minerais rares.

Plutôt que d'adapter le scénario du film, le réalisateur canadien a imposé à Ubisoft de s'en éloigner. Pour donner une plus grande liberté aux joueurs, qui peuvent choisir l'un des deux camps. Mais surtout pour «renforcer l'univers et la marque Avatar», explique Patrick Naud, producteur exécutif du jeu.

«Cameron voit le jeu comme une extension de son monde. Il nous a forcés à créer de nouveaux personnages, une nouvelle mythologie, de nouveaux environnements...», dit M. Naud à l'AFP.

Ce véritable travail de fourmi a nécessité un maximum de matière grise, par exemple pour créer des animaux à six pattes aux mouvements réalistes.

«Est-ce que les deux autres pattes partent en avant, en arrière? Comment tout est imbriqué partie par partie? Et ensuite, comment faire ces structures de manière à ce qu'elles soient jouables et intégrables dans une console...?», raconte Cédric Rang, chef de projet du volet animation du jeu.

Au final, cette collaboration poussée entre le géant du jeu vidéo et le réalisateur hollywoodien a abouti à des échanges réciproques assez inédits. «Dans le film il y a des costumes et des véhicules qu'on a créés, des sons qui viennent du jeu», remarque Patrick Naud.

Et pour soutenir ces développements, le recrutement tourne à plein régime. Le studio montréalais d'Ubisoft, déjà l'un des plus grands du monde, va recruter près d'un millier de personnes d'ici trois ans.