Dans l'industrie du jeu vidéo, les emplois sont occupés en majorité par des hommes, mais de plus en plus de femmes y font carrière comme artistes, conceptrices, directrices de production ou programmeuses. Elles représentent entre 10 et 20 % de l'effectif, et leur apport est très important dans un secteur qui propose ses produits à un public plus vaste que celui des hardcore gamers. Le Soleil a voulu savoir comment les femmes des cinq grands studios de jeu de Québec avaient fait ce choix de carrière. Et, contrairement à la croyance populaire, ce ne sont pas des tom boys dans un univers d'adolescents boutonneux. DEUXIÈME DE CINQ

Julie Sanschagrin, directrice artistique, Karine Bédard, modeleuse d'environnement, Stéphanie Lapointe, animatrice 3D, et Marie-Ève Tremblay, programmeuse et productrice associée, se disent heureuses et bien intégrées dans la grande famille de Beenox ou la moyenne d'âge est de 26 ans, et où il y a plus de petits frères que de petites soeurs.

La mentalité étant plus jeune, la façon de voir le monde est différente, notamment pour l'intégration des femmes dans le milieu de travail où la passion pour le jeu est le noeud central des différentes productions. Chez Beenox, les femmes représentent 8 % du nombre d'employés dans tous les secteurs (275 personnes en tout), mais seulement 4 % dans le secteur de la production.

Pour trois des quatre jeunes femmes rencontrées en entrevue, une seule ne joue pas ni n'a joué avec des jeux vidéo. Les autres ont appris dans leur milieu familial. Marie-Ève, la première fille embauchée chez Beenox, jouait avec sa mère et sa tante sur la console Nintendo. Elle a eu la piqûre en bas âge. «Si les filles avaient plus de modèles féminins pour le jeu, elles joueraient plus et on en trouverait davantage dans les studios.»

Julie a été baignée dans l'univers du jeu avec ses frères un peu plus âgés. Et Stéphanie qui se dit un peu tom boy, comme les deux autres, adore jouer, même aux jeux de combat.

Et pour montrer son tempérament, elle raconte qu'elle jouait avec des camions Tonka et qu'elle a appris à chasser dans sa Beauce natale à l'âge de 12 ans.

Comme dans les autres studios visités par Le Soleil, elles n'ont jamais été victimes de remarques sexistes ou déplacées. Elles ont rencontré des gars gentils, attentionnés qui font même attention avec leurs blagues grivoises bien que le naturel entre gars revienne rapidement au galop. «Nous vivons dans un milieu de travail jeune où les gars ont conservé leur côté gamin, et nous aussi, disent-elles. C'est normal dans le monde du jeu d'être un peu gamin, d'avoir le goût de s'amuser. Par contre, les gars ne sont pas coulés dans le même moule. Il y a très peu de nerds, on en voit de tous les genres et de toutes les personnalités.»

Et elles se sentent bien intégrées dans une équipe lorsqu'elles entendent une réflexion du genre : «Je peux te dire ça à toi parce que t'es pas tout à fait une vraie fille, tu travailles avec nous». «Ça c'est bon signe, avouent-elles, comme si on était un chum de gars.»

Et souvent, les gars consultent leurs collègues féminines pour acheter un cadeau à leur blonde, pour trouver un restaurant romantique ou un petit quelque chose qui ferait vraiment plaisir à une fille.

Virginie Faucher, qui est aux communications, raconte comment sa garde-robe a changé assez radicalement en passant d'un cabinet ministériel à une entreprise de jeu. Fini les costumes et les tailleurs ajustés et les souliers chic à talons hauts.

Comme partout dans le studio, la mode est au style décontracté. Et les gars feront des remarques si l'une d'entre elles arrive en tenue de soirée ou si un gars se promène en veston cravate pour participer à un événement plus mondain. Et dans la famille Beenox, au moment de l'entrevue d'embauche, on tient certainement compte des aptitudes, mais encore plus des attitudes qui font en sorte que les employés, hommes ou femmes, se respectent et se sentent respectés.

ytherrien@lesoleil.com