Le jeu vidéo, qui tient cette semaine à Leipzig (est de l'Allemagne) son plus grand salon européen, veut être reconnu comme un art à part entière, loin des polémiques sur certaines créations jugées trop violentes.

200 000, c'est le nombre de visiteurs qu'espèrent les organisateurs de la «Games Convention», qui ouvrira ses portes au public du 21 au 24 août, après 185.000 entrées l'an dernier. Tous les grands noms du secteur seront représentés, à l'exception notable du géant Nintendo.

L'engouement du public est révélateur du boom ininterrompu du marché des jeux sur ordinateur ou console. En Allemagne, la Fédération des technologies de l'information et de la communication Bitkom attend une progression de 13% du chiffre d'affaires des jeux vidéo cette année, à 2,6 milliards d'euros.

Ce qui en fait un secteur «au moins aussi important que la musique et le film» selon le Bitkom. Aussi important, et peut-être bientôt aussi respectable: en Allemagne tout du moins, le jeu vidéo est en passe d'acquérir ses lettres de noblesse artistique.

La semaine dernière, le Conseil culturel allemand a officiellement accueilli en son sein la Fédération des développeurs de jeux vidéo (GAME). Cette institution influente, qui rassemble plus de 200 fédérations liées aux métiers des médias et de la culture, est un interlocuteur-clef des pouvoirs publics.

 «Nous menions depuis deux ans des discussions souvent très vives, il y a eu une résistance farouche en raison du caractère violent de certains jeux. Mais aujourd'hui, il me semble impossible de nier la dimension artistique de cet univers», explique à l'AFP le directeur du Conseil, Olaf Zimmermann.

Le directeur de GAME, Malte Behrmann, a lui qualifié «d'historique» la décision de l'institution. «Notre industrie fait définitivement son entrée dans le monde de la culture», selon lui.

Pour M. Zimmermann, «il ne faut pas confondre la discussion artistique avec le débat moral. Bien sûr certains jeux sont sanglants, et il ne faut pas les mettre dans les mains des enfants, mais cela ne change rien à leur qualité esthétique.»

Autre indice de la meilleure réputation du jeu vidéo: les députés allemands ont décidé de créer de véritables «Oscars» du jeu vidéo, dotés de 600 000 euros (940 300 $) au total et rassemblant dix catégories.

La plus forte récompense, 150 000 euros (235 000 $), ira au meilleur jeu développé en Allemagne, dans l'un des 200 studios que compte le pays. La première édition doit avoir lieu l'an prochain.

À Leipzig, les organisateurs ne peuvent toutefois ignorer les polémiques qui continuent autour du caractère violent de certaines créations. Le meilleur exemple récent en est sans doute le jeu culte «Grand Theft Auto», qui met en scène un gangster sans scrupule et connaît un énorme succès commercial.

Une halle entière doit être consacrée à la famille, en faisant la part belle aux jeux éducatifs, rassemblant enfants et parents.

Autre point fort de l'édition 2008 de la Games Convention: un hommage aux jeux «rétro», qui ont fait le bonheur de milliers d'adolescents dans les années 1980.

Les «Pacman» et autres «Tetris», au design primaire mais à l'efficacité redoutable, restent incontournables, par exemple dans leurs versions adaptées aux téléphones portables.

Un hommage spécial doit être rendu au jeu «Space Invaders», qui consiste à détruire des envahisseurs extraterrestres à l'aide d'un canon laser, à l'occasion du trentième anniversaire de sa création.

Quant aux mélodies électroniques indissociables de tous ces jeux, elles seront célébrées lors d'une comédie musicale, avec orchestre et choeurs.

Malgré le succès du salon, Leipzig devrait accueillir cette année sa dernière «Games Convention.» Les organisateurs comptent en effet délaisser l'ex-RDA pour s'installer à l'ouest, à Cologne.