Le géant chinois de l'internet Baidu est visé par une enquête des régulateurs, après la mort d'un étudiant qui s'était fié à son moteur de recherche pour soigner son cancer --incident qui avivait les critiques sur les pratiques publicitaires du groupe, après avoir fait dévisser son cours à New York.

Wei Zexi, étudiant de 21 ans diagnostiqué d'une forme rare de cancer, avait pris connaissance dans les premiers résultats sur «Baidu Search» d'un traitement expérimental par immunothérapie proposé par un hôpital pékinois.

Il a dépensé quelque 200 000 yuans (39 000$ CAD) dans ce traitement mais sans aucun succès, avait-il expliqué en février dans un message posté sur le forum Zhihu.com, peu avant son décès le mois dernier.

Wei tançait l'hôpital pour avoir faussement exagéré l'efficacité du traitement, et accusait Baidu d'avoir classé les résultats de son moteur de recherche en fonction des revenus publicitaires déboursés par les hôpitaux.

Le jeune homme concluait en enjoignant les patients cancéreux à «ne pas se laisser duper».

Le sort de Wei a provoqué ces derniers jours une vague d'indignation sur les réseaux sociaux: en Chine, c'est vers Baidu --moteur de recherche écrasant le marché local (d'où est banni Google)-- que se tournent majoritairement les malades en quête d'informations.

L'autorité de régulation administrant l'internet chinois (CAC) a finalement annoncé lundi avoir ouvert une enquête contre Baidu, de concert avec les autorités sanitaires et commerciales, en promettant de «rendre publiques» leurs découvertes.

De son côté, le directeur général de Baidu, Robin Li, a été convoqué par la CAC pour être interrogé, rapportait le Quotidien des Informations économiques (Jingji Cankao Bao), lié à l'agence étatique Chine nouvelle --ce que Baidu n'a pas confirmé--.

Enfin, une enquête distincte a été ouverte mardi par les autorités sanitaires à l'encontre de l'hôpital incriminé, un établissement rattaché au corps de la police armée et qui se targuait d'offrir «les traitements les plus avancés du monde».

Contenus commandités

L'annonce d'une enquête gouvernementale a sévèrement plombé le cours de Baidu à la Bourse de New York, avec un effondrement de quasiment 8% lundi.

L'enquête pourrait en effet déboucher sur un durcissement réglementaire et obliger Baidu à retirer nombre des placements publicitaires concernant le secteur de la santé, alors que c'est --selon la presse financière chinoise-- l'une des principales sources de ses recettes publicitaires.

La publicité en ligne, tous services confondus, représentait au premier trimestre plus de 94% du chiffre d'affaires de Baidu.

Or, c'est le deuxième scandale de ce type en l'espace de quelques mois.

Baidu avait déjà été épinglé début janvier pour avoir diffusé, sans les présenter comme publicitaires, des contenus commandités promouvant des traitements et des hôpitaux au milieu de forums d'internautes sur la santé, tout en en supprimant les messages négatifs pour ses annonceurs.

La découverte de ces interventions, au sein d'un forum où discutaient entre eux des malades hémophiles, avait fait scandale et suscité la réprobation générale.

Baidu, qui assure différencier ses contenus commandités, a affirmé mardi qu'il «saluait» l'ouverture d'une enquête et promis son «entière collaboration».

Le groupe aurait déjà, selon le portail d'information Sina, limogé l'un de ses vice-présidents responsables des contenus commandités.

«Nous appliquons une vigilance particulière au secteur de la santé (...) Nous avons activement épuré notre base d'annonceurs au fil des ans», a par ailleurs indiqué à l'AFP une porte-parole du groupe.

Pour autant, à l'unisson des internautes, la presse étatique chinoise continuait de fustiger Baidu et le «manque d'attention» accordé à la crédibilité de ses annonceurs.

Le groupe «doit recevoir un traitement disciplinaire pour ses activités sans scrupules auxquelles l'a mené sa soif de profits», s'est indigné dans un éditorial le quotidien officiel Global Times.