La Chine a récemment renforcé son étau sur l'internet en s'attaquant aux réseaux privés virtuels (VPN) qui permettent théoriquement de contourner la censure, causant de vives frustrations et inquiétudes parmi les sociétés étrangères et les défenseurs des libertés.

Les nouvelles restrictions ont commencé à être mises en place avant le congrès du Parti communiste chinois (PCC), qui a permis le mois dernier une transition au sommet du pouvoir.

Les internautes ont constaté un ralentissement général du débit du web durant et après le congrès, ainsi qu'une succession de problèmes touchant le moteur de recherche américain Google.

Et ceux qui espéraient un retour «à la normale» après la grand-messe du PCC sont pour le moins déçus.

«Pour nous c'est catastrophique», confie un homme d'affaires d'une multinationale française, sous couvert de l'anonymat.

«Nous avons l'habitude de travailler, entre nos différents bureaux et filiales, avec Google Drive, qui permet de stocker, de partager et de travailler simultanément sur des documents communs. Et bien cela n'est pas possible».

Un autre expatrié se plaint du ralentissement extrême, voire de la neutralisation fréquente, de Gmail, le service gratuit de messagerie électronique de Google.

«Sans compter, dit-il, les problèmes pour ceux qui étaient habitués à organiser leur emploi du temps et leurs rendez-vous avec Google Agenda».

Le système de censure chinois du web est surnommé la «Grande Muraille informatique» («Great Firewall»), expression associant les mots «Great Wall» (Grande Muraille) et «firewall» (pare-feu informatique).

La Toile est expurgée de sites politiquement sensibles et Pékin contrôle étroitement la communauté d'un demi-milliard d'internautes pour éviter l'organisation de la dissidence.

Twitter, YouTube, Facebook et de nombreux sites d'information sont interdits en Chine mais les utilisateurs peuvent normalement recourir à des VPN, des réseaux privés virtuels, pour contourner ces limitations et consulter des sites en théorie inaccessibles.

Mais de grands fournisseurs de VPN, basés à l'étranger, ont récemment annoncé subir de nouvelles entraves, inédites.Astrill, l'un d'entre eux, a ainsi prévenu, dans un message envoyé à ses clients, que la «Grande Muraille informatique» avait désormais «la capacité de se renseigner, de détecter et de bloquer automatiquement des protocoles VPN».

«Cette actualisation est l'une des pires jamais réalisées et elle affecte non seulement tous les fournisseurs de VPN mais aussi de nombreuses entreprises qui utilisent des protocoles VPN pour connecter différentes filiales de leur réseau», a expliqué Astrill.

Interrogé par l'AFP, le fondateur du site GreatFire.org, qui étudie le système de censure du Net en Chine, a confirmé que les autorités chinoises avaient les moyens techniques pour repérer les données cryptées circulant par les VPN.

«Je suis convaincu que les autorités s'attaquent aux VPN non pas pour empêcher les étrangers de consulter Facebook et Youtube. Il s'agit pour elles d'empêcher les citoyens chinois de contourner leur mainmise sur l'information et la communication», a affirmé cette personne qui utilise le pseudonyme de Martin Johnson.

Deux autres importants fournisseurs de VPN, Witopia et StrongVPN, ont été touchés. Witopia a évoqué des «blocages de protocole (VPN) à l'échelle de tout le pays».

La presse officielle chinoise tente de son côté de justifier le coup de vis des autorités.

«Les problèmes causés par l'internet s'accumulent. Au nom de la liberté individuelle, on y porte en fait gravement atteinte», a affirmé vendredi dans un éditorial le journal Global Times.

«Il nous faut renforcer les règles qui le régissent».