Une loi sur la cybercriminalité aux Philippines a suscité une vague de protestations mercredi, date de son entrée en vigueur, médias, blogueurs et défenseurs des droits humains estimant qu'elle autorisait une surveillance sur internet digne d'une dictature.

De grands médias et de nombreux internautes ont protesté contre cette loi en noircissant leur profil sur les médias sociaux, tandis que des milliers de tweets rageurs étaient postés sur Twitter.

La loi contre la cybercriminalité vise à lutter contre la fraude, l'usurpation d'identité, les pourriels et la pornographie enfantine.

Mais elle qualifie aussi de «délit criminel» la mise en ligne de commentaires jugés diffamatoires et prévoit une peine de prison allant jusqu'à 12 ans, soit des sanctions bien supérieures à celles prévu pour les médias traditionnels.

Autre volet très critiqué: le ministère de la Justice a la possibilité de fermer des sites internet et surveiller des activités sur internet, tels que les courriels, les messages instantanés ou encore les clavardages, sans mandat spécifique.

«Cette loi agit contre les internautes ordinaires et ignore, entre autres, notre droit à la vie privée et à la liberté», écrit sur le site de microblog Noemi Dado, une des blogueuses les plus en vue de Manille.

Pour le sénateur Teofisto Guingona, un des rares membres du parlement à avoir voté contre la loi signée par le président Benigno Aquino, «la mise en oeuvre de cette loi (...) ramènera nos concitoyens à l'époque de la période noire, lorsque la liberté de parole et d'expression n'étaient pas reconnus», a-t-il déclaré dans un communiqué.

Pour les protestataires, cette loi rappelle les tactiques utilisées par le dictateur Marcos pour réduire au silence ses opposants, lorsqu'il avait imposé la loi martiale dans les années 70.

«La loi de prévention de cybercriminalité de 2012 est la pire attaque contre la liberté d'expression depuis que Ferdinand Marcos a déclaré la loi martiale», a estimé Luis Teodoro, professeur de journalisme à l'université des Philippines, sur son blog.

L'entourage du président assure que le gouvernement veillera à préserver la liberté d'expression sur internet.