L'explosion des services informatiques en nuage et l'hébergement de données et de sites internet pourraient s'avérer payants pour Montréal, une des villes nord-américaines les mieux placées pour en profiter. Outre la forte croissance attendue par les fournisseurs locaux, des sociétés étrangères viennent s'établir ici, pour conquérir l'ensemble de l'Amérique.

L'été dernier, le groupe de recherche américain 451 Group, spécialisé dans l'infrastructure des technologies informatiques, a dressé la liste des villes nord-américaines les plus accueillantes pour les centres de données informatiques. Montréal et ses 11 fournisseurs y arrivent au sixième échelon, loin devant Toronto, seule autre ville canadienne en lice.

Une géographie avantageuse, des ressources énergétiques abondantes et des secteurs privés et publics en quête de solutions abordables pour gérer leurs données informatiques placent Montréal en tête des régions canadiennes et nord-américaines pour l'hébergement de données et de sites internet, résume l'agence américaine.

«D'ici cinq ans, les grands fournisseurs locaux que sont Bell et Canix connaîtront une expansion considérable de leurs activités, attirant à Montréal de nombreuses sociétés étrangères qui s'ajouteront à une clientèle actuellement composée à 75-80% d'entreprises locales «, dit l'agence.

Un nouveau géant naît à Montréal

En fait, l'attrait de Montréal comme pôle nord-américain se fait déjà sentir. Tout juste avant les Fêtes, Octave Klaba, fondateur du fournisseur de services internet français OVH, a annoncé sur Twitter la venue de sa société dans la métropole québécoise. «J'ai le plaisir de vous annoncer que OVH démarre la construction d'un datacentre de 360 000 serveurs au Canada», a-t-il écrit. OVH Canada s'établira à Beauharnois, dans une ancienne usine d'électrolyse de Rio Tinto Alcan, fermée depuis 2009.

Les objectifs montréalais d'OVH sont pour le moins ambitieux. Avec ses 100 000 serveurs installés en France, c'est déjà le plus gros joueur européen dans ce marché, sixième au monde. En quadruplant de taille, le fournisseur français grimperait au troisième échelon des sociétés possédant le plus grand nombre de serveurs, derrière Microsoft (500 000) et Google (1 million).

Depuis l'annonce plus ou moins officielle sur Twitter, OVH refuse de commenter la nouvelle. Il faut donc prendre les chiffres de M. Klaba avec un grain de sel, mais les experts du milieu estiment qu'il s'agit d'un geste inévitable pour le fournisseur français, qui se devait d'ouvrir un centre nord-américain s'il souhaite soutenir sa croissance.

Pas de frousse pour iWeb

OVH Canada s'ajoute donc aux 11 fournisseurs déjà présents à Montréal. De quoi raviver la concurrence? Pas vraiment, estime Éric Chouinard, cofondateur d'iWeb Technologies, troisième joueur en importante à Montréal derrière Bell et Canix.

«L'industrie croît à une vitesse moyenne de 25 à 30% par an et à Montréal, les fournisseurs se spécialisent dans des champs différents. Ça ne nous concernera pas tellement puisque nous ciblons un marché différent de celui d'OVH.»

Tout juste ressorti de la Bourse de croissance de Toronto, iWeb envisage l'avenir avec optimisme. L'entreprise doit installer mille nouveaux serveurs chaque mois et ses revenus pourraient augmenter de près de 50% cette année, à 45 millions. Sauf qu'au lieu de cibler le marché nord-américain, iWeb souhaite se rapprocher de l'industrie du web montréalais, lui offrant une option de rechange à Amazon, très populaire dans ce créneau.

«Avec les nouveaux services en nuage que nous lançons ce printemps, nous visons les développeurs et les entrepreneurs montréalais. On veut aider à créer les prochains Beyond the Rack», résume M. Chouinard. «Montréal est près de Boston et de New York, nous pouvons aussi devenir un joueur important des technos de la côte Est, comme Amazon l'est pour la Silicon Valley dans l'Ouest.»