Ah, l'anonymat. Concept clé des premiers balbutiements d'internet, la possibilité de sauter d'un site à l'autre en utilisant un simple pseudonyme semble de plus en plus chose du passé. Ça fait non seulement l'affaire des sites comme Facebook et Google+, mais aussi des annonceurs...

La disparition graduelle de l'anonymat sur internet prend différentes formes. Outre la fameuse adresse internet (ou adresse IP) que les fournisseurs d'accès attribuent à chacun de leurs clients, et qu'ils n'hésitent pas ensuite à retracer pour satisfaire les studios hollywoodiens craignant le téléchargement massif de leurs oeuvres, les fichiers témoins (cookies) font aussi un excellent travail pour cerner nos habitudes individuelles sur la Toile.

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Récemment, le Wall Street Journal a mis à la disposition des internautes un répertoire des 50 sites web américains laissant couler le plus d'information au sujet de leurs visiteurs. Parmi les sites les plus connus et les plus susceptibles d'être visités par des internautes canadiens : MSN (de Microsoft), eBay, Yahoo!, AOL, CNN, IMDB et Photobucket.

Sans identifier personnellement les internautes, ces sites placent des cookies et autres petits fichiers témoins sur l'ordinateur de leurs visiteurs permettant à leurs agences de pub, et dans plusieurs cas, à des sociétés tierces inconnues des internautes, de suivre pas à pas leur parcours sur la Toile. Des cinquante sites étudiés par le Wall Street Journal, plus de la moitié présente un niveau d'exposition des données de ses visiteurs allant de moyen à très élevé.

Ces pratiques ne sont rien de bien nouveau. Ce qui est nouveau, c'est que deux des sites les plus avares de données sur leurs utilisateurs sont aussi deux des plus grands promoteurs de la fin de l'anonymat sur internet : Facebook et Google.

Il n'y a pas une semaine, Randi Zuckerberg, la soeur du fondateur de Facebook Mark Zuckerberg, s'est dite en faveur de la fin de l'anonymat sur la Toile, afin d'éliminer les commentaires vulgaires et les mauvais comportements. « Les internautes se comportent beaucoup mieux lorsque leur nom est visible », a-t-elle résumé lors d'une conférence. On se demande si son frère est du même avis.

Chose certaine, il doit regarder d'un oeil intéressé son nouveau rival, le réseau Google+, dont les dirigeants ont annoncé il y a quelques jours de cela qu'ils comptaient s'attaquer aux pseudonymes et aux comptes dont le nom n'est pas celui de l'internaute l'ayant créé. C'est d'ailleurs une des nouvelles règles mises en place lorsque vient le temps de s'abonner à Google+ : pas le droit de s'identifier autrement qu'avec son véritable nom.

Pour l'internaute soucieux de sa vie privée, c'est peut-être sacrilège. Pour Google, dont les revenus sont intimement liés à la publicité sur internet, et sur la précision de son ciblage pour chacun des internautes rencontrés sur la Toile, c'est un enjeu stratégique important. On imagine mal, dans ce contexte, comment l'anonymat pourra survivre encore bien longtemps...