En partie grâce aux réseaux sociaux, la plupart d'entre nous agissent sur l'internet comme à la maison: on laisse traîner quelques photos sur Facebook, on entasse ses documents de travail dans un classeur Dropbox et on empile le courrier sur Gmail. Une habitude imprudente, prévient l'Union des consommateurs.

L'automne prochain, l'organisme québécois publiera les résultats de la comparaison de la politique d'utilisation de neuf des services web les plus populaires face aux lois sur la protection du consommateur et de sa vie privée. Sa conclusion: comme à la maison ou au bureau, si vos affaires traînent, elles risquent d'être vues par n'importe qui.

«Une majorité de ces services ne respectent pas la loi. Ils ne s'approprient pas le contenu qu'on y publie, mais ils exigent une licence pour l'utiliser à toutes les sauces. Il faut donc être prévoyant, car s'il y a fuite, on n'aura aucun moyen de les tenir responsables», résume Me Anthony Hémond, analyste en télécommunications à l'Union des consommateurs.

Et fuite il y a. Souvent. Par exemple, ce printemps, le service de stockage en ligne Dropbox a flanché. L'espace d'une demi-journée, sans effort particulier, n'importe qui pouvait consulter le contenu de ses serveurs.

De la pub ciblée à la pub involontaire

Un autre aspect inquiétant de cette situation, note Me Hémond, c'est que ces services peuvent, s'ils le désirent, analyser nos données afin de nous présenter, par la suite, de la publicité modelée sur nos besoins ou nos goûts.

Pis encore, l'inverse pourrait même se produire: une publication d'un internaute, commentaire écrit ou clip vidéo, qui deviendrait assez populaire pourrait être récupérée comme slogan publicitaire, sans consentement ni rétribution à son créateur.

«Le flou encadrant ces licences est dangereux, pas tant pour l'internaute moyen que pour des artistes ou des créateurs de contenu», conclut le porte-parole de l'Union des consommateurs.

Ces artistes, pourtant, ont de moins en moins le choix: pour rejoindre leur public, Facebook, c'est le nouveau MySpace... «C'est inquiétant, mais c'est un risque que tout le monde prend vu la popularité de Facebook, et l'absence de précédent», note Jeanbart, rappeur montréalais particulièrement branché.

Pour éviter le pire, Jeanbart et son groupe, Omnikrom, ne publient que des hyperliens sur Facebook, stockant leurs oeuvres ailleurs sur la Toile. Mais même là... «Récemment, Dropbox a changé sa politique d'utilisation. C'est toujours inquiétant, quand ce sont des services sur lesquels une bonne partie de ton travail repose.»

Si on peut décider qui entre ou n'entre pas dans notre maison, sur l'internet, les portes sont toutes grandes ouvertes. La clé, elle, a été égarée il y a bien longtemps...