Invités à l'e-G8 à Paris, plusieurs dirigeants de rédactions prestigieuses, à l'image du New York Times, ont dit mercredi ne pas craindre internet, malgré la profonde crise que traverse la presse écrite, assurant que «c'est le contenu qui (les) définit, pas le mode de distribution».

Depuis qu'internet a explosé, on ne compte plus les journaux qui ferment. Vivement concurrencée par la gratuité, même si elle n'est pas systématique, et, surtout, par l'immédiateté de l'information disponible en ligne, la presse écrite s'interroge sur son avenir: jusqu'à quand les rotatives vont-elles tourner?

Interrogé à ce sujet au deuxième jour de l'e-G8 dans le jardin des Tuileries, plusieurs patrons de presse ou de rédactions ont assuré qu'ils ne redoutaient finalement pas tant que ça cette éventuelle échéance, préférant insister sur les opportunités offertes par le web où ils ont déjà investi massivement.

Il est vrai cependant que la plupart représentaient des rédactions on ne peut plus prestigieuses et solidement ancrées depuis des décennies dans le paysage médiatique: le New York Times, le Financial Times en Angleterre ou La Repubblica en Italie.

«La presse papier ne va pas disparaître, on voit des baisses des ventes au numéro, mais on a des abonnés fidèles. Et depuis plus de deux ans, ils ont plutôt tendance à augmenter», explique Arthur Sulzberger, PDG du New York Times.

«Mais il faut rester flexible, car la technologie change très rapidement, et continuellement satisfaire les besoins de nos lecteurs. Il faut être préparé à prendre des risques», a-t-il toutefois ajouté.

«Il ne faut pas arrêter le papier. La radio et la télévision, déjà, devaient faire disparaître les journaux. Internet, c'est une grande opportunité de croissance», a souligné pour sa part Carlo de Benedetti, patron du groupe L'Espresso, qui publie notamment la Repubblica.

«Les journaux déclinent, mais on tire déjà 40% de nos revenus publicitaires sur le web», a-t-il continué, tout en regrettant que Google s'empare d'une partie de ses contenus et «génère des revenus avec».

Si pour l'instant les contenus sont gratuits, le dirigeant pense en faire payer une partie à l'avenir: «On va demander de payer, mais pas pour savoir ce qui est arrivé, mais pourquoi c'est arrivé et quelles en sont les conséquences».

«Notre modèle, c'est d'avoir une certaine quantité de contenu gratuitement, puis, au bout de 10 articles, nous estimons qu'il est temps de payer», a expliqué Robert Shrimsley du Financial Times.

«La disparition de la presse écrite, ce n'est pas de notre ressort: ce sont les lecteurs qui vont décider comment et sur quoi ils veulent lire. Car le plus important, c'est la qualité du contenu», a-t-il précisé.

«C'est le contenu qui nous défini, pas le mode de distribution, que ce soit un journal ou un iPad. Le contenu nous défini, on doit être sans religion pour le mode de distribution», a renchéri Arthur Sulzberger, patron d'un journal réputé comme un des plus en pointe au monde sur le web, et qui a récemment décidé de faire à nouveau payer une partie de ses contenus qui ont été gratuits pendant trois ans.

«Le modèle économique ne change pas, a-t-il conclu, c'est la qualité des contenus qui attire des lecteurs de qualité, lesquels attirent des annonceurs de qualité. Aujourd'hui, toutes les 4 secondes, un article du New York Times est twitté».