Le secteur des jeux vidéo gratuits sur internet est depuis plusieurs années en plein essor, au point d'attirer désormais des grands noms du divertissement comme les américains Disney ou Electronic Arts, au moment où le marché du jeu historique stagne.

Owlient, Kobojo ou Bigpoint sont moins connus que Nintendo, Sony ou Microsoft mais ils représentent plusieurs millions de joueurs dans le monde.

Contrairement au marché historique du jeu vidéo, qui repose sur l'acquisition d'un titre coûtant en moyenne 60 euros, leur modèle économique baptisé« free-to-play» est fondé sur un accès gratuit, avec l'achat facultatif au coup par coup d'objets pouvant faciliter la progression.

«Nous enregistrons chaque année une progression de notre chiffre d'affaires qui tourne autour de 70%», explique à l'AFP Olivier Issaly, PDG de l'éditeur français Owlient, qui a participé à la deuxième Web Game Conference organisée jeudi dans le quartier d'affaires de la Défense près de Paris.

Son studio, créé en 2005 et qui a engrangé l'an passé des revenus de 5,3 millions d'euros, revendique deux millions de joueurs actifs chaque mois, et il escompte que «cela va continuer au cours des prochaines années».

Les coûts de développement des jeux gratuits sont bien moindres que ceux des productions sur consoles, qui peuvent se compter en dizaines de millions de dollars, mais les retombées sont tout aussi incertaines.

«Si le jeu n'est pas bon, les gens s'en détournent et il reste des serveurs à payer», souligne Nicolas Gaume, président du Syndicat national du jeu vidéo (SNJV), qui rassemble les professionnels français de cette industrie.

Le pari d'Owlient était loin d'être gagné: «Quand on s'est lancé en 2005, le "free-to-play", qui a émergé en Asie, en était à ses débuts en Europe et était inexistant aux États-Unis. Après 2007-2008, quand Facebook a explosé, le marché a connu un vrai coup d'accélérateur», se souvient M. Issaly.

Cette croissance, que la crise de 2008 n'a pas affectée alors que le jeu vidéo classique a souffert, a depuis attiré des grands groupes du milieu du divertissement, qui se sont positionnés sur le secteur.

«C'est un modèle qui n'est pas facile pour les entreprises anciennes qui doivent se réinventer mais qui peut être rentable pour celles qui ont commencé par là», décrypte le président du SNJV pour justifier cette consolidation.

Ces derniers mois, Disney a ainsi racheté l'éditeur Playdom, spécialisé dans les jeux pour réseaux communautaires sur internet, pour 536,2 millions de dollars, plus un total pouvant aller jusqu'à 200 millions de dollars si certains objectifs sont atteints.

Bigpoint, numéro un allemand du secteur avec 185 millions de joueurs enregistrés, va pour sa part passer sous le contrôle de deux fonds américains qui y injectent 350 millions de dollars.

Le géant du jeu vidéo américain Electronic Arts, numéro deux mondial derrière Activision-Blizzard, a lui commencé à mettre en avant Easy Studios, son développeur spécialisé dans les jeux gratuits.

Si les États-Unis sont en pointe sur le secteur, la France peut se targuer d'occuper la deuxième place, se réjouit M. Gaume, qui soulève au passage la difficulté à lutter économiquement contre d'autres pays.

«Nous sommes souvent vus comme des sociétés de services mais nous sommes des industriels, certes sans usines. On rencontre donc des problématiques bien connues comme la disparités des salaires entre les différentes régions du monde par exemple», détaille-t-il.