Coupé pour tenter de contrecarrer la mobilisation anti-Moubarak, internet reste inaccessible en Égypte mais des solutions s'improvisent depuis l'étranger, où de petits fournisseurs d'accès et des groupes d'activistes mettent à disposition leurs réseaux bas débit.

Coupé pour tenter de contrecarrer la mobilisation anti-Moubarak, internet reste inaccessible en Égypte mais des solutions s'improvisent depuis l'étranger, où de petits fournisseurs d'accès et des groupes d'activistes mettent à disposition leurs réseaux bas débit.

Afin de neutraliser un outil-clé pour l'opposition, le réseau des quatre principaux opérateurs égyptiens sont inaccessibles depuis jeudi soir, une première mondiale par son ampleur dans l'histoire du web.

«À l'heure actuelle, c'est toujours coupé et il y a environ 3% des "routes" internet qui sortent et rentrent d'Égypte, dont celle de la Bourse du Caire», a indiqué lundi à l'AFP Jérémie Zimmermann, co-fondateur de l'organisation citoyenne La Quadrature du Net.

«Il n'y a que le réseau de Noor, opérateur de la Bourse égyptienne, qui pousse un tout petit peu de trafic», indique Julien Coulon, cofondateur de la société française Cedexis, «aiguilleur du net» qui réoriente les demandes de recherche vers les meilleurs fournisseurs d'accès internationaux en fonction du trafic en temps réel.

«Mais la nouveauté, c'est que comme le réseau RTC (téléphonie fixe) est toujours accessible, il suffit d'un bon vieux modem bas débit -ceux qu'on utilisait avant l'ADSL-, un numéro de téléphone à l'étranger et un mot de passe pour qu'un internaute égyptien puisse se connecter», explique M. Zimmermann.

Plusieurs petits fournisseurs d'accès ainsi que des groupes d'activistes étrangers ont ainsi mis à disposition des Égyptiens des réseaux bas débit: c'est le cas du français FDN, le plus vieux fournisseur d'accès internet en France, qui a le statut d'association loi 1901.

Concrètement, il suffit de composer depuis l'Egypte le numéro +33172890150 puis d'entrer les identifiant et code d'accès «toto» pour se connecter à FDN.

«Ce sont en fait des infrastructures que l'on garde pour que nos adhérents puissent se connecter lorsque leur ligne ADSL est en panne», indique Benjamin Bayart, président de FDN.

«C'est une infrastructure qui permet de gérer sur du bas débit quelque 7000 abonnés, même si en simultané elle ne peut supporter qu'une trentaine de connexions. Mais comme cela coûte une fortune, les gens ne gardent pas la connexion longtemps», souligne-t-il.

«C'est une possibilité de connexion mais c'est plutôt lent, c'est l'internet du milieu des années 1990! Mais ça peut aider pour la distribution d'informations et de photos», souligne Rik Ferguson, expert sécurité pour Trend Micro, troisième éditeur mondial de solutions de sécurité.

Selon M. Bayart, «nous sommes assez nombreux dans cette pratique, nous avons vu circuler toute une liste de numéros de téléphone».

En Suède, Telecomix fait aussi beaucoup parler de lui: le groupe suédois des défenseurs des libertés numériques a également mis en place un numéro (+46850009990) et des codes d'accès et mots de passe telecomix/telecomix pour permettre aux Égyptiens de se connecter via la ligne fixe.

Outre la connection satellitaire, qui reste réservée aux personnes possédant un téléphone adapté comme les journalistes, n'importe quelle personne à l'étranger «en possession d'un vieux modem peut l'ouvrir et en faire un accès pour des amis égyptiens», estime Julien Zimmermann.

«Cela demande cependant quelques compétences techniques», souligne M. Bayart: «il faut brancher un modem de votre côté et installer sur votre ordinateur un logiciel qui va gérer le raccordement», selon lui.

Pour Benjamin Bayart, «on ne se permettrait pas d'avoir une opinion politique sur ce qui est bon ou pas bon pour l'Égypte, par contre les gens ont le droit à une liberté fondamentale qui est la liberté d'expression, et internet sert à cela. On répare donc comme on peut».