Les nouvelles technologies qui permettent de voter grâce à internet prennent pied aux Etats-Unis, où elles sont considérées comme un moyen d'améliorer le taux de participation mais éveillent des craintes sur la sécurité des systèmes.

Au total, 33 des 50 États américains permettent cette année aux électeurs de voter par courriel, par télécopie ou en ligne aux élections de mi-mandat de ce mardi, selon l'organisation Verified Voting Foundation, qui étudie la sécurité des systèmes de vote.

Ces systèmes, également utilisés dans d'autres pays, peuvent permettre d'augmenter la participation mais leur sécurité reste un point d'interrogation, en particulier après un test effectué sur un programme pilote de vote sur internet à Washington, la capitale fédérale américaine.

Une équipe de spécialistes en informatique de l'université du Michigan n'a eu aucun mal à infiltrer le système, modifier les bulletins de vote et changer les mots de passe.

«Ce fut extrêmement facile. Nous avons trouvé un accès au code en moins de trois heures et en 36 heures nous avions pris le contrôle du système», explique Alex Haldeman, professeur de l'université du Michigan qui dirigeait le groupe d'étudiants «pirates».

Plus grave, M. Haldeman a découvert que d'autres pirates informatiques, y compris depuis l'Iran et la Chine, avaient eux aussi essayé de prendre le contrôle de ce système.

«Après cela, il n'y a aucun doute: dans le débat sur la sécurité des systèmes de vote par internet, la charge de la preuve repose désormais sur ceux qui affirment que le système peut être sécurisé», souligne le président de Verified Voting, David Jefferson.

Cet épisode rappelle le dysfonctionnement catastrophique des cartes à voter perforées en Floride lors de l'élection présidentielle de 2000, ou encore la polémique entourant les machines à voter électroniques, qui ne laissent aucune trace écrite et donc aucun moyen de recompter les voix.

«Je pense que le vote par internet représente l'avenir, mais, comme pour tout nouveau système, il faut des tests et des vérifications solides pour que l'opinion publique puisse avoir confiance dans les résultats», estime Richard Soudriette, président honoraire de l'International Foundation for Election Systems, qui joue un rôle d'observateur dans des scrutins et apporte son expertise partout dans le monde.

Pour Paul DeGregorio, de la société Everyone Counts, qui fournit des systèmes de vote électronique, les critiques «sont bien intentionnés mais ne prennent pas en compte le contexte». Le vote électronique, souligne-t-il, permet aux personnes handicapées, aux soldats en poste à l'étranger ou aux expatriés, soit environ 6 millions d'Américains, de faire entendre leur voix.

Pour lui, le vote traditionnel décourage les électeurs jeunes et technophiles. «Les jeunes vont dire: pourquoi devrais-je faire la queue pendant une heure pour mettre mon bulletin dans l'urne? Pourquoi est-ce que je ne peux pas voter avec mon téléphone portable?».

Mais Susan Dzieduszycka-Suinat, présidente de l'Overseas Vote Foundation, qui aide les Américains de l'étranger à voter, n'est pas prête à soutenir le vote en ligne, parce que «si quelque chose se passe de manière anormale, il est possible qu'on ne s'en rende jamais compte».

Alex Haldeman, tout informaticien qu'il est, recommande le vote avec de bons vieux bulletins en papier: «Ceux qui ont le plus étudié la question de savoir comment mettre en place des systèmes fiables sont ceux qui jugent impossible de se passer du papier, étant données les limites actuelles de la technologie».