Des pirates informatiques ont réussi à entrer dans le serveur du respecté centre de recherches sur le climat (CRU) de l'université britannique d'East Anglia et mis en ligne des centaines de documents et courriels privés, alimentant le débat sur le degré d'influence humaine dans le réchauffement de la planète.

L'université de l'est de l'Angleterre a déclaré dans un communiqué samedi que la police avait ouvert une enquête mais qu'elle ne pouvait pas se prononcer sur l'authenticité ou non des fichiers publiés sur Internet, selon elle sélectionnés dans un but malveillant.Parmi le millier de courriels et les 3000 autres documents se trouvent plus de dix ans de correspondance entre des scientifiques britanniques et américains de renom.

Certains sceptiques interprètent ces informations comme la preuve de ce que les scientifiques auraient exagéré, voire falsifié, les données concernant le réchauffement de la planète. Leur colère est d'autant plus grande à l'approche de la conférence internationale de l'ONU sur le changement climatique à Copenhague.

À compter du 7 décembre, les 192 pays de l'ONU tenteront d'élaborer un traité pour succéder au protocole de Kyoto contre les émissions de gaz à effet de serre (GES) à son expiration en 2012. De nombreux responsables, dont le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon, se montrent pessimistes sur les chances d'un accord à Copenhague.

Dans l'un des courriels rendus publics par le(s) hacker(s), le directeur du CRU, Phil Jones, écrit à des collègues au sujet de graphiques exploitant des statistiques climatiques pour le dernier millénaire. Il dit avoir employé «une manip'» (manipulation) empruntée à un météorologue de l'université d'Etat de Pennsylvanie, Michael Mann, pour «dissimuler le déclin» récent des températures dans le monde. Le Pr Mann n'a pas répondu aux sollicitations de l'Associated Press.

Certaines données suggèrent actuellement un palier dans le réchauffement de la planète, alors que d'autres suggèrent qu'il se poursuit. Une analyse des températures dans le monde menée par des statisticiens indépendants à la demande de l'Associated Press a mis en lumière en octobre la poursuite de l'augmentation et non un refroidissement de la planète, comme l'affirmaient des sceptiques du réchauffement climatique.

Mais l'utilisation du mot «manip'» par le directeur du CRU a immédiatement été interprétée par les sceptiques comme l'aveu d'une tricherie et d'une collusion entre scientifiques pour étayer leur théorie sur l'influence de l'activité humaine sur l'augmentation des températures.

«Je ne sais même pas quoi dire», écrit Stephen McIntyre sur son site Web climateaudit.org, où il expose ses doutes sur la version officielle du changement climatique.

Phil Jones nie de son côté toute falsification des données, assurant que ses commentaires ont été sortis de leur contexte. «Le mot de «manip» est utilisé ici de façon familière, pour dire que c'est astucieux. C'est ridicule de suggérer que cela fait référence à quoi que ce soit de fâcheux», affirme-t-il dans un communiqué.

L'université d'East Anglia estime pour sa part que les informations volées et publiées sur Internet ont été sciemment choisis pour saper «le consensus fort sur l'impact potentiellement dangereux de l'activité humaine sur le climat mondial».

«La publication sélective de quelques courriels volés et autres messages sortis de leur contexte est malveillante et ne peut pas être considérée comme une vraie tentative de s'attaquer à la question de façon responsable», déclare l'université.