Les journaux américains se rebiffent: confrontés à l'effondrement des recettes publicitaires, au ralentissement des ventes et à la concurrence de l'internet, ils tiennent à faire savoir qu'ils restent pourtant un média vivant et populaire.

«Il y a plus de gens qui liront un journal aujourd'hui qu'il y en avait hier soir pour regarder» le Superbowl, la finale du championnat de football américain, a fait valoir lundi le «Newspaper project», dans un encart publicitaire publié par les deux grands quotidiens de la côte Est, le New York Times et le Washington Post.

«Avec 100 millions de lecteurs quotidiens, les journaux sont une occasion formidable de toucher des cibles», souligne cet encart, s'adressant aux annonceurs publicitaires.

Donna Barrett, la directrice d'un conglomérat de gazettes locales qui est membre du Newspaper Project, a expliqué de son côté: «nous rejetons la notion que les journaux, et le contenu de valeur produit par les journalistes de presse, n'aient pas d'avenir».

Sur le site internet NewspaperProject.org, il est expliqué que plusieurs patrons de presse se sont regroupés pour «développer un échange de vues et d'informations constructif sur l'avenir des journaux».

«A la différence des sites internet qui multiplient les articles plus ou moins apocalyptiques sur l'avenir des journaux, celui-ci sera consacré à des articles, commentaires et analyses pénétrants fournissant une approche plus équilibrée de ce que peuvent faire les sociétés de presse pour survivre et se développer dans les années qui viennent», est-il précisé.

Le Newspaper Project, qui a déjà placé son premier encart dans le New York Times, prévoit encore de se faire connaître dans 300 autres publications du pays.

Une autre initiative, non coordonnée, invite les utilisateurs du site de socialisation Facebook à s'unir pour soutenir les journaux - avec visiblement un certain succès puisque des dizaines de milliers de personnes s'y sont déjà associées.

Chris Freiberg, reporteur au journal de l'Alaska Fairbanks News Daily-Miner, a lancé sur Facebook «la journée où on achète un journal», lundi.

«Peu importe que ce soit un quotidien ou un hebdomadaire, un journal de droite ou de gauche. Si vous êtes étudiant et que le journal de l'Université est gratuit, allez acheter le quotidien local», demande M. Freiberg.

La crise des journaux américains, concurrencés comme ailleurs par internet, s'est brusquement accélérée ces derniers mois sous l'effet de la récession, qui a entraîné une chute brutale des revenus publicitaires.

Beaucoup ont pu récupérer au moins partiellement en publicité internet ce qu'ils perdaient en publicité papier, mais un journal comme le New York Times a vu ces derniers mois le reflux des recettes gagner même son site web.

L'impact est sévère pour la profession: plus de 15.600 salariés d'entreprise de presse ont quitté leur travail l'an dernier, soit renvoyés soit à la suite d'un guichet départ, selon des chiffres compilés par une journaliste du St. Louis Post-Dispatch, Erica Smith, qui tient un relevé sur son blog graphicdesignr.net/papercuts/.

Le groupe Tribune, l'un des plus gros groupes de presse du pays, propriétaire notamment du Chicago Tribune et du Los Angeles Times, a d'ailleurs déposé son bilan en décembre, et tente depuis lors de se réorganiser à l'abri des créanciers.

Plus inquiétant encore, une enquête menée en 2008 par le centre de recherches Pew Research Center a révélé qu'internet était devenu la principale source d'informations nationales et internationales pour les Américains, devant les journaux.