Pour contrer le piratage des longs métrages qu'il distribue au Canada, Alliance Film a conclu récemment une entente avec Apple qui permettra aux internautes de télécharger dès les premiers mois de 2009 les films québécois, européens et doublés en français distribués ici par Alliance Vivafilm. Les cinéphiles peuvent déjà louer et acheter des films de langue anglaise (tel Sex and the City) en tapant www.itunes.ca.

L'annonce de cette entente a été faite par Patrick Roy, président et chef de la direction d'Alliance Vivafilm, au cours d'une conférence organisée par Infopresse hier à Montréal. «Nous devons nous réinventer, comme l'industrie de la musique», affirme Roy.

 

De quelle façon Apple et Alliance se partagent-elles les revenus des ventes et locations en ligne de films? «Disons que c'est équitable pour nous, que c'est juste comme entente, répond Patrick Roy. Apple tient compte du marché local.»

Depuis deux ans, Alliance Vivafilm se tourne de plus en plus vers l'internet pour la promotion des films que l'entreprise distribue. «On a mis du temps à prendre le tournant», avoue Patrick Roy. Les premiers essais ont été faits à la veille de la sortie en salle de Bon Cop, Bad Cop. Un clip dans lequel on voyait deux policiers se battre devant des gars filmant la scène avait alors été lancé sur le web. «On espérait, avec ce clip, créer un scandale et ouvrir le bulletin de nouvelles de Radio-Canada! Ça ne s'est pas produit, mais le film a été vu par des milliers de personnes.»

Rapidement, les achats publicitaires sur l'internet ont augmenté. «On maquille maintenant des sites aux couleurs des gros films arrivant en salle et on lance tous nos concours sur le site d'Alliance, explique Patrick Roy. Pour Cruising Bar 2, par exemple, on a fait une offensive Facebook. On n'a toutefois pas attiré le nombre de membres souhaités, à cause du manque de budget notamment. Mais quelques médias s'y sont inscrits et en ont parlé.»

Pour se démarquer dans un marché saturé, le président d'Alliance Vivafilm admet qu'on ne peut plus se contenter d'une campagne promotionnelle traditionnelle (affichage sur des panneaux géants le long des autoroutes, par exemple). Mais malgré la diversification dans les méthodes de promotion des nouveaux films, les recettes au box-office québécois continuent de fléchir, depuis 2005. De 2003 à 2007, les revenus sont passés de 207 millions à 181 millions, alors qu'en Amérique du Nord, ils ont grimpé de 9,17 milliards à 9,63 milliards. «On doit se pencher sur le phénomène, juge Patrick Roy. C'est difficile pour l'instant de dire pourquoi les revenus baissent ici. Nous avons quand même des pistes de réflexion. Le prix des billets de cinéma a augmenté partout en Amérique du Nord, alors qu'au Québec, il est stable depuis trois ans. Par ailleurs, est-ce que l'offre culturelle au Québec est plus importante qu'ailleurs? La prolifération de festivals gratuits l'été à Montréal et en région pousse peut-être moins les gens à aller au cinéma.»

Patrick Roy pointe aussi la mise en marché particulière au Québec pour expliquer la baisse. «Elle se fait de façon instinctive, plus qu'analytique ici. Alors qu'aux États-Unis, grâce à ce qu'on appelle le tracking, on peut retravailler en cours de route la campagne publicitaire d'un film qui n'attire pas autant de gens que prévu en salle. Ce système, appliqué au Québec, nous permettrait peut-être de renverser la vapeur. Ici, on se ferme les yeux quand on lance un film. Il arrive donc qu'on ait de mauvaises surprises.»