Le guitariste Érik Mongrain reste méconnu de la majorité des mélomanes québécois, mais grâce à sa technique de jeu particulière - ainsi qu'à YouTube! -, sa renommée a, depuis quelques années, dépassé les frontières de la province.

Le jeune virtuose de la guitare acoustique lance aujourd'hui Equilibrium, son nouvel album, avant d'entamer une série de concerts en Grande-Bretagne et en Irlande.

On la dit originaire d'Afrique, et âgée de cinq siècles; sa version moderne - six cordes attachées par un manche à une caisse de résonance dont on joue à l'aide d'un pic ou de ses doigts - a été inventée en Espagne, au XVe siècle. Depuis le temps, on croyait avoir exploré toutes les possibilités de la guitare. Pas encore, jure le Montréalais Érik Mongrain.

«Oui, ça fait longtemps qu'on gosse sur cet instrument-là. Malgré tout, je pense qu'il reste encore des choses à inventer, grâce à d'autres outils qui nous permettent d'en jouer, de nouveaux effets sonores, de nouveaux gadgets qui en transforment la sonorité. Ou encore en accordant différemment les cordes de l'instrument...»

Mongrain consacre sa vie à explorer les possibilités de la guitare, usant d'un savant mélange de toutes ces techniques pour s'imposer sur une scène musicale qui passe pour hermétique, tout en réussissant à captiver les néophytes.

À preuve, le succès phénoménal que le musicien a remporté sur YouTube. Il y a quelques années, Mongrain, qui s'est d'abord fait découvrir en 2005 à la défunte émission Les pourris de talents (sur MusiquePlus), a été invité à Belle et Bum.

Son interprétation d'une de ses propres compositions (Air Tap), au cours de laquelle il semble jouer de la guitare comme d'un piano, l'instrument couché sur ses cuisses, les doigts pianotant sur les frets du manche, a été vue plus de 3,6 millions de fois.

«Plus que ça, en fait! Si on compte tous les autres exemplaires du même clip, encore sur YouTube ou d'autres plateformes, j'ai estimé que le clip avait été vu près de 10 millions de fois!» corrige-t-il.

«C'est ridicule, en un sens, ajoute-t-il. Je ne pensais pas que ça serait aussi populaire. Ça a vite fait le tour du monde. Et ça m'a apporté plein de concerts. Paul Reed Smith (un célèbre luthier, fabricant des guitares PRS Guitars), m'a invité à enregistrer dans son studio, au Maryland. Il m'a même envoyé un prototype d'une de ses nouvelles guitares. Un drôle de bonhomme...»

Guitariste «100% autodidacte» depuis l'âge de 16 ans, Mongrain réussissait à gagner sa vie en donnant de petits concerts dans les bars, en jouant dans le métro, dans la rue.

«Tout a décollé à partir des Pourris de talents», une opportunité qui lui a ensuite permis d'enregistrer avec Serge Fiori - l'un des juges de l'émission.

Aujourd'hui, le talent de Mongrain est désormais reconnu dans les cercles d'amateurs de guitare acoustique.

«On est une quinzaine dans le monde à faire de la musique comme ça», dit Mongrain, lui-même inspiré par le travail et la démarche du regretté virtuose américain Michael Hedges.

«Il y en a qui se spécialisent trop dans une seule manière de jouer, que ce soit le tapping, le finger picking, etc. Hedges, lui, ne se limitait pas qu'à une technique, il essayait plein d'affaires. C'est aussi ce que je fais.»

Le musicien passera tout le mois de novembre en Grande-Bretagne et en Irlande, où une vingtaine de concerts sont prévus.

«À mes concerts, c'est sûr, il y a plein de guitaristes qui viennent voir comment je joue, ma technique... Mais à ma grande surprise, il y a beaucoup de gens qui sont simplement touchés par mes compositions. Ma plus grande peur, c'est d'être qualifié de musicien qui fait de la musique pour initiés. Du moment que ça te pogne dans les tripes, ça n'a finalement aucune importance, la technique.»