L'image que Montréal projette à l'étranger n'est peut-être pas celle qu'on pense. Plus que les autoroutes en gruyère et le morne paysage qui sépare l'aéroport Trudeau du centre-ville, c'est la vitalité des technos et, surtout, la présence d'un large réseau de points d'accès sans fil à l'internet qui la définissent aux yeux de plusieurs Européens et Américains. Ce réseau est cependant mis en péril par la lenteur administrative de la ville centre, constate Daniel Drouet, président d'Île sans fil.

L'organisme à but non lucratif gère actuellement un réseau de 150 points d'accès gratuits. Au printemps 2007, M. Drouet explique avoir été pressenti par la ville pour coordonner le déploiement de 150 à 250 points d'accès additionnels, dans les parcs et les lieux publics. En décembre, un comité public a recommandé d'adopter le projet.Un réseau menacé

Depuis, le dossier a été repoussé deux fois, en mai et au début d'août. «On devait lancer ça cet été», dit M. Drouet, ajoutant que ce retard menace aujourd'hui la survie d'Île sans fil, qui a modifié sa structure afin d'anticiper la croissance. «On est à un tournant: soit on triple de taille, soit c'est l'inverse qui va se produire.»

Pour ce projet, ISF demande un financement public de 200 000 dollars par an, pendant cinq ans. Après quoi, le tout serait autofinancé, assure M. Drouet. C'est une formule qui s'apparente à celles de Québec et Sherbrooke, où ISF a aidé à mettre en place, avec succès, des projets similaires. À titre comparatif, le même projet, à Paris, a coûté 2 millions d'euros (3 millions CAN) pour être installé, et coûtera un demi-million d'euros par an à la Ville lumière.

À la Ville de Montréal, on reste vague quant à la progression du dossier.

«C'est un projet qui chemine dans l'administration, assure Pierre Villeneuve, directeur des relations avec les citoyens. Les autorités devraient prendre une décision au fil des prochaines semaines.»

Bon pour l'image

Dans son numéro de juin dernier, le magazine anglais Monocle a publié son palmarès des 25 villes les plus «vivables» au monde. Montréal occupe le 16e rang. C'est la deuxième ville nord-américaine derrière Vancouver (à l'exception d'Honolulu). La publication londonienne explique ce classement par la forte densité d'entreprises du jeu vidéo et de l'aérospatiale et de leurs emplois de haut niveau. Elle ajoute que Montréal possède «un large réseau d'accès sans fil à internet» qui contribue à la qualité de vie de ses principaux quartiers.

À Austin, au Texas, l'organisme Less Networks gère un réseau de points d'accès sans fil dont se servent plus de 236 000 internautes mobiles. Le financement de ce réseau provient en partie de la municipalité, qui a installé des points d'accès dans ses parcs et ses bibliothèques.

Lors d'une conférence, le printemps dernier, Richard MacKinnon, PDG de Less Networks, avouait s'être inspiré de trois modèles: Barcelone, Berlin et Montréal. Pour illustrer l'impact de son réseau, l'entreprise calcule les sommes dépensées par ses membres dans les commerces où elle gère des points d'accès. Depuis 2003, ce montant s'élève à 8,9 millions de dollars.

Sébastien Provencher, cofondateur de Praized Media, assistait à la conférence.

«Ça fait drôle d'entendre parler de Montréal de cette façon quand on est au Texas», blague l'entrepreneur montréalais, pour qui un réseau urbain est un outil vital de développement économique. Praized Media est une entreprise spécialisée dans la recherche locale de commerces à partir de l'internet. Un réseau wi-fi urbain gratuit est, dans son cas, une source potentielle de clients pour elle.

«Un réseau comme celui d'Île sans fil est extrêmement important pour des entreprises comme la nôtre, conclut-il. Avoir une infrastructure wi-fi, ça stimule l'innovation technologique.»