Le tribunal de commerce de Paris rendra lundi sa décision dans une affaire qui oppose les marques Louis Vuitton Malletier, Christian Dior Couture et quatre filiales de parfums de LVMH au site d'enchères en ligne eBay, qu'elles poursuivent pour contrefaçon et vente illicite.

Ces marques du leader mondial du luxe réclameraient au géant américain de l'internet eBay Inc. et à sa filiale suisse eBay AG quelque 50 millions d'euros, selon diverses sources proches du dossier.

Elles l'accusent d'abord d'avoir, en connaissance de cause, laissé les internautes vendre sur ses sites de faux sacs, bâtons de rouge à lèvre, parfums ou encore vêtements de prêt-à-porter.

Parallèlement, elles estiment que la vente de ces produits, même lorqu'ils sont authentiques, déroge au système de distribution des cosmétiques et parfums de luxe par des revendeurs agréés.

Le jugement, qui sera rendu lundi à 12H00, interviendra après plus de deux ans de procédure et l'examen de milliers de pièces. L'audience des plaidoiries, en avril, avait duré huit heures, rappelle une source proche du dossier.

La bataille porte sur trois dossiers distincts, que la justice a décidé de joindre en raison de la proximité des questions qu'ils soulèvent.

Dans les deux premiers, Louis Vuitton Malletier d'une part et Christian Dior Couture d'autre part poursuivent eBay pour «négligence fautive».

Les marques de luxe estiment qu'eBay se rend coupable de vente de produits contrefaits car il ne fait pas suffisamment pour l'empêcher sur ses sites, explique une source proche du dossier.

Pour cette «négligence» présumée, Louis Vuitton Malletier réclamerait 20 millions d'euros de dommages-intérêts et Christian Dior Couture 17 millions, selon des sources concordantes.

Parallèlement, les parfums Dior, Guerlain, Givenchy et Kenzo demanderaient entre 12 et 14 millions pour des faits de «vente illicite», indique-t-on de même source.

«Ces marques reprochent à eBay le fait qu'il vende ces parfums, même authentiques, alors que le marché est organisé autour d'un système de distribution sélective et de revendeurs agréés», explique une source proche du dossier.

Plusieurs grandes marques françaises de luxe, de parfums et de cosmétiques ont engagé depuis plusieurs mois une offensive judiciaire contre eBay qu'elles accusent de laxisme dans le contrôle des articles vendus sur ses sites.

La maison Hermès a obtenu début juin la première condamnation française du site pour «contrefaçon», à savoir le paiement, solidairement avec une utilisatrice, de 20.000 euros de dommages-intérêts. EBay a depuis fait appel de cette décision, a-t-on appris de source proche du dossier.

Une autre affaire opposant Louis Vuitton au site devrait être jugée d'ici à la fin de l'année, a-t-on appris de sources concordantes. Et L'Oréal, numéro un mondial des cosmétiques, a assigné le site en justice à l'automne 2007, dans cinq pays européens, dont la France, pour «contrefaçon de flacons de parfums».Pour sa défense, eBay souligne régulièrement qu'il a mis en place, depuis 2006, des mesures de contrôle renforcées, tout en estimant que les marques doivent elles aussi continuer de vérifier si les produits vendus sur son site sont contrefaits.

Parmi ces mesures figurent l'établissement d'une liste de marques et de produits le plus souvent contrefaits, et le lancement d'une enquête dès lors que la mise en vente d'un lot d'articles important ou d'un produit dans un conditionnement «suspect» est repérée: par exemple, un flacon de parfum Chanel N°5 de 300 ml, flacon qui n'existe pas.

EBay a en outre supprimé la possibilité de poster une annonce pendant moins de trois jours pour des articles fréquemment contrefaits. Objectif: laisser à ses équipes le temps de mener une enquête sur le vendeur.

Contactées vendredi, les parties au dossier qui sera jugé lundi se sont refusées à tout commentaire.