Le tout nouveau magazine Shock , en kiosque depuis hier, pourrait adopter comme slogan la célèbre phrase d'Yvon Deschamps : «On ne veut pas le savouère, on veut le vouère.»

Le tout nouveau magazine Shock , en kiosque depuis hier, pourrait adopter comme slogan la célèbre phrase d'Yvon Deschamps : «On ne veut pas le savouère, on veut le vouère.»

Et on voit, avec force détails et couleurs : sur la page couverture de la publication papier glacé lancée par le groupe Hachette Filipacchi Médias (HFM), se côtoient un soldat américain embrassant la tête ensanglantée d'une kamikaze irakienne (oui, juste la tête, le reste a explosé), un gros plan sur la bouche horriblement déformée d'une boxeuse sous la pression du gant de son adversaire, une torche humaine et... Jessica Simpson. Bref, les fameux trois S de la presse à sensation : du sang, du sexe et du sport!

Pendant anglophone du bimensuel français Choc , Shock est lancé à bas prix (1,99$) aux États-Unis et au Canada, avec un tirage initial de 300 000 exemplaires. Depuis deux ans, le grand frère français est rentable, soutient HFM, et tire à 350 000 exemplaires, avec une pénétration de 4,8 millions de lecteurs et une forte composante sexe : le plus récent numéro fait le point sur les nouvelles poupées gonflables !

Shock semble tabler plutôt sur la violence et l'indécence, si on en juge tant par le magazine que son site Internet (www.shocku.com), qui constitue la première «plateforme multimédia» dans le monde du magazine, affirme HFM on peut en effet s'abonner aussi à la version numérique de la revue. Mais surtout, on y invite les internautes à envoyer leurs vidéos les plus osées, décadentes ou sanglantes, au choix. Encore une fois, la version française a fait école, puisque les vidéos et photos amateurs sont nombreuses sur le site français (www.choc.fr) et qu'elles alimentent la publication papier (10% des images seraient fournies par des lecteurs).

Magazines haute vitesse

Internet plus exactement Google est d'ailleurs le fer de lance de la campagne publicitaire de Shock , dont le public cible est les lecteurs mâles âgés de 18 à 24 ans. C'est Mike Hammer, auparavant à la tête du magazine Stuff, très orienté sexe, qui a pris les commandes de Shock : «Nous ne sommes pas là pour offenser, a-t-il soutenu en entrevue, mais la société a changé. Les gens veulent leurs nouvelles rapidement, immédiatement, visuellement et bourrées d'attitudes.» Attitude, il y a, il faut le reconnaître : sous la photo du soldat américain, la légende se lit : «"La preuve bouleversante que l'Irak EST le nouveau Vietnam.» On ne sait pas encore comment les lecteurs américains potentiels réagiront à cette prise de position. La tendance haute vitesse qui sévit dans les magazines a poussé le groupe HFM à cesser la publication de sa revue ElleGirl , l'an dernier, parce que ses lectrices préféraient surfer plutôt que lire. Mais les nouvelles «hard» ont encore de belles heures devant elles en format papier, semble-t-il, puisque HFM a lancé récemment un autre magazine sur le marché français, Guts, lui aussi axé sur le sexe et la violence «en direct» ou, pour reprendre les mots du site du groupe d'édition, «une vision du monde à l'état brut»...

Comme dans les pages de Choc , peu de publicités dans Shock puisque ce sont les ventes en kiosque qui génèrent les revenus. Les ventes en kiosque, mais aussi le téléchargement de photos sur les cellulaires à partir du site Internet : selon Jack Kliger, PDG de la filiale américaine de HFM, le magazine français Choc fait des recettes de plus de 20 000 euros (environ 30 000$) chaque mois grâce à ces téléchargements.

Bref, on est loin des autres magazines chic publiés par HFM ( Paris Match, Elle, Metropolitan Home...) et peut-être plus près des univers glauques de Stephen King et John Le Carré, qui sont tous deux publiés par la branche édition de HFM. Le vrai slogan de Shock , en première page ? «Bienvenue dans le vrai monde.»

Sources: Bloomberg, Financial Times et Le Figaro.