La menace d'une pandémie de grippe aviaire soulève un vent de folie sur le Web. Des internautes inquiets achètent des doses de l'antiviral Tamiflu à des prix exorbitants, de peur d'en manquer.

La menace d'une pandémie de grippe aviaire soulève un vent de folie sur le Web. Des internautes inquiets achètent des doses de l'antiviral Tamiflu à des prix exorbitants, de peur d'en manquer.

Sur le site de vente aux enchères eBay, une dose de 10 comprimés de Tamiflu atteignait 126 $US, hier en matinée. À côté de ce véritable antiviral, on trouvait des dizaines de produits soi-disant « de remplacement » qui ont fait leur apparition hier.

En fin de journée, on pouvait notamment y trouver pour 5,29 $US une infusion d'anis étoilé chinois (chinese star anise). Cette plante qui entre dans la composition du Tamiflu, est présenté comme une « option » au véritable médicament.

Pour 57 $US, d'autres vendeurs proposaient plutôt une vitamine appelée Immunitril. « Prendre Immunitril renforcera votre système immunitaire de façon à le protéger contre une éventuelle pandémie du virus aviaire », soutient l'annonce, pour laquelle une trentaine de personnes ont fait une offre.

Une simple recherche sur Google a aussi permis de trouver des dizaines de sites Web qui affirment vendre le Tamiflu sans ordonnance. Au moment de procéder à la commande, sur le site canadien Drugdelivery.ca, un avis indiquait toutefois que le médicament a été retiré jusqu'à nouvel ordre en raison de la pénurie mondiale qui sévit.

« Comme produit de remplacement, vous pouvez commander le Relenza (150 $US pour cinq doses) ou l'Amantadine (75 $US pour 60 capsules), qui sont des médicaments également utilisés pour combattre la grippe aviaire », suggère l'avis.

À la direction de la santé publique, on incite les gens à se montrer prudents devant de telles offres. « Je ne dirais pas que le Relenza et l'Amantadine sont des médicaments équivalents au Tamiflu. Le Relenza est un bon deuxième choix, mais l'Amantadine a jusqu'à maintenant apporté des résultats très décevants », prévient le Dr Michel Savard, médecin-conseil au ministère de la Santé et des Services sociaux.

« Nous ne décourageons pas les gens d'avoir des médicaments contre la grippe aviaire en leur possession, mais nous ne leur conseillons pas d'acheter de tels médicaments sans ordonnance », ajoute-t-il.

Le calme dans les pharmacies

En France, où le Tamiflu est disponible en vente libre, les pharmacies sont elles aussi prises d'assaut. Ce n'est pas le cas au Québec. Du moins, pas pour le moment. « Il n'y a aucune augmentation des ventes pour le moment. Nous n'avons pas non plus augmenté nos réserves de Tamiflu. Nous sommes loin d'un vent de panique », a déclaré la porte-parole du Groupe Jean Coutu, Hélène Bisson.

« Il n'y a pas de file d'attente dans les pharmacies, a confirmé la porte-parole de l'Association québécoise des pharmaciens propriétaires, Annick Mongeau.»

Pour être efficace, le Tamiflu doit être pris dans les 48 premières heures suivant l'apparition des premiers symptômes. Vendu sur ordonnance, il n'est pas couvert par le régime public d'assurance médicaments. Le Relenza ne l'est pas davantage.

Dans le plan d'action qu'il est en train de fignoler, le gouvernement du Québec a prévu l'achat d'antiviraux. À ce jour, près de 10 millions des 11 millions de doses de Tamiflu prévues ont été achetées.

Hier, la compagnie pharmaceutique Roche, qui fabrique le Tamiflu, a accepté de « partager ses droits » avec d'autres sociétés capables de produire le médicament. Roche subissait depuis plusieurs jours la pression des autorités américaines. Craignant de ne pas avoir des réserves suffisantes d'antiviraux, elles lui demandaient de jeter du lest sur sa licence.

La menace de grippe aviaire est bien réelle, estime le sous-ministre adjoint à Santé Canada, Ian Shugart. La semaine prochaine, des ministres de la Santé de nombreux pays et des experts seront réunis à Ottawa pour une conférence sur le sujet.

À l'ordre du jour, des discussions sur les antiviraux, mais aussi sur les vaccins et les plans d'urgence à mettre en place. Les travaux seront ardus. « La collaboration et l'échange d'information entre les pays seront très importants. Si chaque pays en comprend l'importance, ce sera un bénéfice pour le Canada », croit M. Shugart.

Reflet de ces difficultés, la Chine a annoncé hier qu'elle faisait face à une situation grave avec la résurgence de la grippe aviaire. Au même moment, Moscou affirmait qu'il ne fallait pas craindre une épidémie. Une nouvelle victime s'est aussi ajoutée: il s'agit d'un fermier thaïlandais qui avait mangé de la volaille contaminée.

Au pays, Santé Canada a fait savoir qu'il n'y a pas lieu de s'inquiéter. On peut continuer de manger du poulet sans danger.

Avec l'Agence France-Presse