Après avoir été plombé par les succès de ses rivales Apple et Samsung, BlackBerry (T.BB) fera cette semaine ce que certains de ses critiques croient qu'elle aurait dû faire il y a des années: s'allier à une des tendances fortes du marché des téléphones intelligents plutôt que s'obstiner à les combattre.

Pour la première fois de son histoire, BlackBerry lancera vendredi un téléphone qui ne fonctionne pas sous son propre système d'exploitation, mais plutôt sous celui de Google, Android.

Il s'agit d'un compromis à plus d'un égard. Le plus grand écran tactile du nouvel appareil évoque le design de la plupart des téléphones intelligents sur le marché, tandis qu'un clavier physique coulissant vise les utilisateurs plus traditionnels des téléphones BlackBerry, qui voient dans ce clavier un des atouts les plus précieux des appareils du fabricant.

Avec ce nouvel appareil baptisé Priv, la société espère lancer une réflexion sur les informations personnelles partagées à l'insu des utilisateurs avec de tierces parties par l'entremise d'une variété d'applications.

BlackBerry promet que le Priv aidera ses utilisateurs à savoir exactement qui a accès à leurs informations en surveillant la légitimité des applications et en leur indiquant combien de fois des services comme celui du réseau social Facebook et les jeux gratuits transmettent des détails comme les coordonnées GPS, les fichiers d'images ou des détails sur l'activation du micro.

Reste à savoir si ces propositions seront suffisantes pour convaincre les anciens amateurs de BlackBerry de rentrer au bercail.

BlackBerry a refusé pendant des années de fabriquer un téléphone Android, malgré les appels de certains analystes qui l'accusaient d'avoir une vision télescopique et d'ignorer une partie des plus gros problèmes avec ses propres appareils.

Le recours au système d'exploitation pour téléphones le plus populaire au monde résout un des plus grands problèmes du plus récent modèle de BlackBerry: le manque d'applications, ce qui le place à des années-lumière des autres téléphones qui peuvent, entre autres choses, visionner du contenu sur Netflix, partager des photos sur Instagram et interagir avec d'autres sur Snapchat.

Les dirigeants de BlackBerry ont tenté de surmonter cet obstacle, mais, avec chaque nouvelle année qui passait, il devenait de plus en plus difficile de faire abstraction de la vitesse à laquelle les appareils de la société s'éloignaient de ce que le grand public attend d'un téléphone intelligent.

Au cours des prochaines semaines, BlackBerry dévoilera une campagne de marketing qui ne comptera pas de grande cérémonie de lancement - l'argent sera plutôt investi dans des publicités pour la saison cruciale du magasinage du temps des Fêtes.

Mais l'objectif de BlackBerry - soit hausser ses ventes de téléphones - pourrait s'avérer être un énorme défi face aux géants de cette industrie, particulièrement les téléphones iPhone d'Apple et les appareils Galaxy de Samsung.

Cette année, une série de téléphones moins dispendieux, comme le Nexus de Google, ou les appareils de Sony et de LG, ont aussi gagné en popularité, ce qui pourrait compliquer encore davantage la tâche de BlackBerry, puisque le Priv est plus dispendieux - il se détaille à 899 $ sur la boutique en ligne de BlackBerry sans contrat avec un fournisseur de services de télécommunications.

Si les chiffres de ventes du Priv sont décevants, il ne faudra pas se surprendre de voir BlackBerry procéder à une nouvelle ronde de mises à pied et abandonner la fabrication de téléphones pour se concentrer davantage sur ses activités de licences de logiciels et de services.

«L'avenir des activités de combinés de BlackBerry dépend du succès ou de l'échec du Priv», a estimé l'analyste du secteur technologique Carmi Levy.

«Si cet appareil n'inverse pas le cours des ventes, il faudra s'attendre à une décision rapide dans la nouvelle année.»