La division cartographie du finlandais Nokia, Here, attire les convoitises de tous ceux qui veulent échapper à la domination de Google Maps, et qui sont prêts à payer cher pour l'acquérir.

Ceux qui optent pour les plans de Here plutôt que pour ceux de Google ne transmettent alors aucune donnée au géant américain de l'internet.

Nokia n'a plus vraiment besoin de cette activité de cartographie, lui qui veut se concentrer sur les équipements de réseaux et s'apprête à absorber le français Alcatel-Lucent. Mi-avril, en même temps que l'accord de fusion, il a annoncé envisager la mise en vente de Here.

Selon l'agence financière Bloomberg, les candidats au rachat se bousculent au portillon.

Il y aurait Uber, la plateforme américaine de réservation de voitures de transport avec chauffeur (VTC), allié au géant chinois de la recherche sur internet Baidu, face à des constructeurs automobiles allemands normalement concurrents (Audi, BMW et Mercedes). Mais aussi une poignée de fonds d'investissement.

«Ce qui se passe est favorable à Nokia. Ce n'est pas seulement que plusieurs acheteurs font monter les enchères. C'est que ces gens-là s'allient pour présenter des offres ensemble», souligne Pierre Ferragu, analyste pour le courtier Sanford C. Bernstein.

Bloomberg, qui cite des sources proches des négociations, évoque une transaction qui «pourrait se monter à pas moins de quatre milliards de dollars».

Here est valorisé à deux milliards d'euros dans les comptes de Nokia, groupe qui vaut près de 24 milliards à la Bourse d'Helsinki. Cette filiale est l'héritière de Navteq, société américaine que le Finlandais avait acquise pour 8,1 milliards de dollars en 2008.

«Cet actif a une valeur stratégique qui se matérialisera en le cédant, pas en le gardant», ajoute M. Ferragu. «La cartographie est un métier à l'avenir très incertain. Google et Apple ont une offre complètement intégrée: si vous êtes Uber ou BMW le risque est de se retrouver coincé entre ces deux grands acteurs. Donc l'enjeu est de sécuriser un service indépendant».

Nokia a timidement tenté de faire connaître ses cartes au grand public, en offrant une application pour téléphones intelligents qui permet de naviguer sans connexion internet. Mais la marque Here a une très faible notoriété, alors qu'elle a un portefeuille solide de clients dans l'industrie ou internet.

Elle revendique les quatre cinquièmes des plans des GPS intégrés aux voitures vendues en Europe et Amérique du Nord, et fournit des grands noms comme Facebook ou Amazon.

Pour Sami Sarkamies, de la banque Nordea, la géolocalisation «est un secteur en développement rapide, et cela ne se voit pas encore dans les chiffres. Au fil des ans, les acteurs sur ce marché devraient pouvoir trouver d'autres sources de bénéfices, comme les voitures sans conducteur».

Pour lui, Nokia n'a pas forcément intérêt à entrer dans cette course. «L'activité navigation, c'est très différent des réseaux. Il n'y a pas de synergies, ou très peu», estime-t-il.