La télévision ultra haute définition (UHD), grand espoir des fabricants de téléviseurs pour redresser leurs ventes, suscite un nombre croissant d'expérimentations mais cette technologie fait encore face à beaucoup d'obstacles pour voir sa diffusion s'imposer en France.

Les téléviseurs Ultra HD (appelés aussi 4K en référence à la résolution de leurs écrans proche des 4000 pixels) déjà disponibles promettent une expérience «immersive» dans l'image, un rendu des couleurs amélioré et une vision des détails qui permettra, par exemple, de voir jusqu'à la sueur perlant sur le front des joueurs de tennis.

Si l'obstacle du prix des TV 4K pourrait bientôt être surmonté - en moins d'un an, le prix de ces téléviseurs a été divisé par deux - reste le problème des tuyaux pour la diffusion, du poids des images très lourdes à transporter et surtout des contenus.

Pour l'instant, faute de programmes adaptés, l'heureux propriétaire de ces téléviseurs d'exception (1 à 2% du marché en France) en est réduit à regarder des films 4K à partir d'un lecteur blu-ray.

La plupart des films sont déjà tournés en 4K, un format particulièrement prometteur aussi pour les documentaires et la retransmission de spectacles vivants ou d'événements sportifs.

Développement des contenus

«Prochainement des smartphones haut de gamme permettront de la capture en 4K, des appareils photos reflex également, donc on voit un faisceau convergeant qui fait que l'Ultra HD arrive de partout sur le marché», explique à l'AFP Morand Studer, du cabinet de conseil en transition numérique Eleven.

Le patron de Netflix Reed Hastings a annoncé au salon CES de Las Vegas début janvier que la deuxième saison de la série au succès planétaire House of Cards sera diffusée en 4K en streaming. Et la Coupe du Monde de football au Brésil devrait permettre les premières diffusions d'évènements sportifs en 4K.

«Il y aura certains contenus américains, la vraie question est la disponibilité des contenus français. On souhaite que le CSA encourage les contenus par le satellite, la fibre et la TNT», a souligné Stephane Cotte, Vice-président de Samsung Electronics France, lors d'une réunion du club parlementaire sur l'Avenir de l'audiovisuel et des média consacrée à l'Ultra HD.

Les opérateurs de satellites, Eutelsat comme SES, ont déjà commencé à mettre en place des chaînes de démonstration de cette technologie.

La diffusion par internet est, elle, subordonnée à la généralisation de la fibre, seule capable de transporter les volumes de données d'une diffusion en Ultra HD. Cependant, pour la diffusion par la TNT, qui est le premier mode de réception de la télévision pour 61% des foyers en France, l'équation se complique.

Alors que les fréquences hertziennes sont une ressource limitée, «il va falloir installer l'UHD dans le spectre, et l'important c'est le rôle du codage», avertit Gilles Brégant, directeur général de l'Agence des fréquences.

Un nouveau standard de compression, le HEVC, réduisant la quantité de données à transporter pour chaque image, commence juste a être testé.

Bataille autour des fréquences

Mais la décision de l'Élysée de transférer la bande de fréquences des 700 Mhz, qui représente 30% des fréquences audiovisuelles, vers les opérateurs télécoms, inquiète les professionnels du secteur qui ne veulent pas que cela se fasse trop vite.

«L'Ultra HD est le format d'avenir de la TNT, il faut maintenant rentrer dans des dispositions concrètes», plaide Olivier Huard, directeur général de TDF, premier diffuseur européen.

Le responsable estime qu'il faut pour cela faut «trois étapes concrètes: un renouvellement du parc de téléviseurs» pour qu'il soit compatible, «un calendrier de bande passante garantissant le passage aux nouvelles normes». Et enfin «7 réseaux nationaux», c'est à dire des groupes de chaînes partageant la même fréquence, pour en réserver l'un d'entre eux, «un multiplex précurseur» dans le jargon des diffuseurs, à l'Ultra HD.

Et même si cet écosystème pourrait être prêt vers 2017, il reste à voir si les producteurs de contenus vont se mettre à ce nouveau format, alors qu'ils n'ont pas encore amorti les investissements consentis pour la HD.

Bernard Fontaine, directeur délégué aux technologies de l'Innovation de France Télévisions remarque qu'il est aujourd'hui encore «compliqué de trouver des équipement de production, encore principalement réservés au cinéma» et que même «les câblages ne sont pas compatibles».