Plaisir et apprentissage, incompatibles pour de nombreux élèves, pourraient faire bon ménage dans les prochaines années grâce aux outils numériques, qui entrent encore difficilement dans les classes alors qu'ils sont omniprésents à l'extérieur des écoles.

«Pour lutter contre l'échec scolaire et l'absentéisme, il faut lutter contre l'ennui à l'école avec de nouvelles pédagogies» qui passeront par les outils numériques, affirme Jean-Michel Fourgous, député-maire d'Elancourt (Yvelines) à l'occasion de l'université d'été de la e-éducation Ludovia à Ax-les-Thermes.

«Les talents de demain ne vont pas se faire avec les méthodes d'hier (...) l'école doit intégrer cet outil ou sera dépassée», assure M. Fourgous, dont la ville se targue d'avoir équipé 100% des classes élémentaires de tableaux numériques interactifs (TNI).

Auteur d'un rapport parlementaire sur les Technologies de l'information et de la communication pour l'enseignement (Tice), il souligne que les jeunes passent désormais autant de temps face à leurs écrans (hors télévision) qu'à recevoir un enseignement à l'école.

Il faut «leur donner envie d'apprendre avant de donner quelque chose à apprendre», estime-t-il.

«Dans l'éducation, le plaisir est une question qui a toujours posé problème», fait remarquer Patrick Mpondo-Dicka, maître de conférence au Laboratoire de recherche en audiovisuel (Lara) de l'université Toulouse-Le Mirail.

«Comment construit-on les connaissances et les compétences, et leur acquisition, de façon à pouvoir procurer du plaisir à ceux qui les acquièrent et à ceux qui les proposent?», s'interroge-t-il.

L'école pose un problème supplémentaire: «On se rend compte que le plaisir est plutôt dans l'apprentissage informel que dans le formel, qui demande de la discipline, de la cohérence, un certain travail», relève M. Mpondo-Dicka.

La parabole du chirurgien

Lorsqu'un jeune «apprend quelque chose par la télévision, le jeu, cela passe par une dimension plaisir évidente», et il faut aujourd'hui trouver le moyen d'intégrer cette dimension dans l'acquisition de connaissances ou de compétences complexes à l'école.

Pour M. Fourgous, «on a démultiplié les capacités physiques avec le marteau, la grue, aujourd'hui on pourrait le faire pour le cerveau avec le numérique, un démultiplicateur d'intelligence».

«Un bon équipement ne fait pas un bon chirurgien», tempère André Tricot, professeur de psychologie à l'Institut universitaire de formation des maîtres (IUFM) Midi-Pyrénées.

«Ces technologies ne sont que des outils (...) le plus important reste les qualités professionnelles, et donc la pédagogie pour ce qui est de l'enseignement», ajoute-t-il.

La formation continue des professeurs pour intégrer ces nouvelles technologies est donc considérée par tous comme le coeur de l'évolution.

«C'est la formation qui est le levier: avec un bon équipement et une bonne formation, les enseignants vont devenir des usagers satisfaits, créatifs, innovants du tableau noir interactif», dit M. Tricot.

L'entrée du numérique à l'école, insiste le rapporteur Fourgous, passe par la formation de tous les professeurs: s'il y a le matériel mais pas de professeur pour s'en servir utilement, «cela ne sert à rien!»

Actuellement, «les professeurs suivent l'évolution, mais c'est lent», constate-t-il.

Or «il faut se bouger vite pour assurer notre compétitivité, avec une culture d'innovation».