Avec plus de 35 000 abonnés et 7700 messages à son actif, le compte Twitter de la police de Montréal marche à plein régime et est devenu un moyen d'interaction avec les acteurs du conflit étudiant qui secoue le Québec depuis presque quatre mois.

«La manifencours se déplace sur Ste-Catherine en direction ouest».

«La manifencours est terminée. Il n'y a eu aucune arrestation ce soir».

Ou encore: «Le ruban de couleur sert à identifier les différentes équipes» de police sur le terrain.

Autant d'exemples de tweets que l'on peut lire sur le compte en anglais et en français de la police de Montréal: SPVM.

Ouvert en avril 2010 avec la volonté «d'informer, échanger et dialoguer» avec la population, ce service a vu sa fréquentation exploser depuis le début de la grogne étudiante mi-février, puis l'adoption le 18 mai de la loi spéciale encadrant le droit de manifester qui a poussé encore plus de gens dans la rue.

«On tweete en général des informations concrètes sur le trajet pris par les manifestants, notamment à destination des citoyens qui veulent éviter les embouteillages», explique Anne Roy, directrice de la communication de la police de la ville.

«Mais des conversations peuvent aussi s'engager.

C'est un moyen de répondre aux questions des gens, qui se demandent par exemple si la manifestation est illégale. Ca leur permet de mieux comprendre nos interventions», souligne-t-elle.

Quid des sujets sensibles, comme ces rumeurs faisant état de policiers cachant le numéro de matricule inscrit sur leur casque pour ne pas être identifiés?

«Grâce à Twitter, nous sommes avisés de ce genre de rumeurs et cela nous permet de réagir plus rapidement (...) Nous ne faisons pas de la dissimulation mais de la communication», insiste-t-elle.

Petite dame blonde d'une quarantaine d'année, Chantal est l'une des tweeteuses officielles, et très actives, du compte SPVM. Avant les grèves étudiantes, elle ne tweetait pas.

Puis avec la montée en puissance du mouvement, elle a commencé à relayer sa collègue chargée des réseaux sociaux, indique-t-elle.

Depuis, les termes «retweeter», «suivre», mettre en «favori» n'ont plus de secret pour elle.

Et ils sont désormais trois à tourner en permanence pour alimenter le compte, avec systématiquement à leur côté un «conseiller de communication» en cas de réponse plus «stratégique» à donner aux internautes.

En face, les manifestants ont aussi pris possession du réseau social et n'hésitent pas à interpeller directement la police, parfois de façon rugueuse, allant jusqu'à citer le numéro de matricule d'agents coupables selon eux de violences.

Une bataille de «hashtags» --ces mots-clés précédés du signe «» -- a aussi été lancée.

Au manifencours de la police, les contestataires ont créé leur casserolesencours, référence aux concerts de casseroles qui ont lieu chaque soir en réaction à la loi spéciale.

Le M. (ou Mme) Twitter des forces de l'ordre est du coup devenu un élément si stratégique qu'il a droit à sa place au sein du Centre de commandement et de contrôle de la police, lieu névralgique des opérations où sur des écrans géants sont affichées cartes en temps réel de l'avancée des manifestations et images de caméras de surveillance.

«La personne qui suit les médias sociaux nous donne le pouls de la foule car souvent les manifestants tweetent en direct», souligne Pierre Cadieux, l'un des chefs d'orchestre de ce centre de commandement.

La directrice de la communication de la police de Montréal, Anne Roy, voit dans ce phénomène Twitter une «tendance sociale» du Canada, très porté sur les réseaux sociaux.

«Au sein du G8 nous sommes les plus grands utilisateurs de Facebook», précise-t-elle. «On pense d'ailleurs créer prochainement notre propre page Facebook».