Au-delà de Netflix et de Tou.tv, l'arrivée massive des téléviseurs connectés, ces appareils capables de récupérer du contenu tiré de l'internet, signale un changement important dans l'industrie de la télévision. Le même changement qu'ont produit des appareils comme l'iPhone, d'Apple, dans la téléphonie mobile depuis cinq ans, en introduisant un nouveau marché d'applications spécialisées.

En vente dans le monde depuis environ un an, les premiers téléviseurs connectés n'ont pas connu le succès commercial souhaité par leurs fabricants. Cette année, par contre, c'est autre chose: plus d'un téléviseur sur trois vendu au Canada peut désormais se brancher à l'internet afin de télécharger divers types de contenu numérique.

Leur portée va bien au-delà des films et des séries télé, observe Gilbert Ouellette, président de la société montréalaise Evolumedia, observateur des nouveaux médias depuis les années 90: les applications qui peuvent être installées sur cette nouvelle génération d'appareils prennent la forme de jeux, de services web et même de commerce électronique. «eBay a beaucoup de succès sur les tablettes numériques. Imaginez sur des téléviseurs», dit-il.

«Ça va changer le paysa-ge télévisuel, c'est sûr. Peu importe la frontière, elle va tomber, qu'elle soit géographique ou technologique. L'industrie de la production et de la diffusion a besoin de se mettre au diapason de ce qui s'en vient», dit celui qui, en mai prochain, organise la conférence Montréal Web Vidéo, consacrée entièrement à l'impact de cette nouvelle télé connectée.

Comme dans la téléphonie mobile, la télé connectée pourrait donner naissance à de nouvelles entreprises spécialisées dans la création d'applications destinées à ces téléviseurs. Des applications qui pourront être vendues à l'échelle mondiale, même si le marché canadien demeure pour le moment assez peu exploité.

Samsung, un des premiers détaillants à faire dans la télé connectée, le confirme: des quelque 1300 applications conçues pour ses téléviseurs Smart TV, 300 seulement sont en vente au Canada. «Les faibles ventes de téléviseurs sont une partie du problème, mais avec les prévisions pour cette année, ça va certainement réveiller les développeurs», expliquait le mois dernier le directeur des affaires corporatives de Samsung Canada, Juan Wee.

Apple, encore?

Comme la mobilité informatique, la télé connectée comportera son lot de plateformes: Google, Intel, LG, Microsoft, Samsung, Sony... La plupart des poids lourds du secteur technologique ont confirmé leur intention d'offrir leur propre solution de télé par internet. Pourtant, le joueur le plus important dans ce créneau pourrait bien être le même qui a déjà profondément transformé le sans-fil: Apple.

Il y a deux semaines, le géant californien a dévoilé une simple mise à jour à son Apple TV, un petit récepteur multimédia donnant accès à sa boutique virtuelle iTunes. Selon Jia Wu, chercheur pour la firme américaine Strategy Analytics, c'est suffisant pour positionner Apple aux avant-postes d'un marché qui pourrait exploser à tout moment.

«Apple a vendu 12 millions d'Apple TV à ce jour, ce qui représente 32% de l'ensemble des téléviseurs connectés actuellement actifs», dit-il. «Si, comme prévu, Apple compte vendre un véritable téléviseur intelligent plus tard en 2012, ses rivaux devront accélérer leur propre développement s'ils ne veulent pas le voir se sauver avec cet éventuel marché de la télé connectée, de la même façon que l'iPhone l'a fait avec la téléphonie intelligente.»