La rivalité Apple-Microsoft n'est pas finie, elle n'a fait que s'inverser

Quiconque s'est endormi en 1990 pour se réveiller vingt ans plus tard croira que c'est le monde à l'envers : alors qu'Apple domine l'industrie mondiale des technologies informatiques, Microsoft se positionne en douce comme aspirant au titre, dans les marchés que domine actuellement l'empire de Steve Jobs.

Le mois de mai 2010 marque un moment important dans la rivalité qui existe depuis trente ans entre les deux entreprises : Microsoft, jusque-là la plus importante société publique du secteur des technologies, a vu sa valeur boursière surclassée par celle d'Apple.

Hier, Apple en a remis, devenant l'espace de quelques heures la deuxième plus importante société publique cotée en Bourse, derrière Exxon Mobil. Sa valeur boursière varie actuellement entre 260 et 265 milliards de dollars US. Microsoft est présentement évaluée à 213 milliards $ US.

Rien de très concret aux yeux des consommateurs, mais là aussi, Apple domine largement les créneaux les plus populaires. Son téléphone iPhone s'accapare peut-être uniquement 2 % du marché mondial de la téléphonie mobile, mais la société de Cupertino engrange actuellement 39 % des profits totaux de ce marché, grâce à son modèle reposant sur la distribution internationale d'applications mobiles.

Sa tablette numérique, l'iPad, est à peu près seule sur le marché, si on fait exception des liseuses numériques comme le Kindle, d'Amazon, qui se cantonne dans un créneau à part. D'ici la fin de l'année, Apple devrait vendre 14,5 millions d'iPad, malgré la concurrence émergente de tablettes Android, le système de Google, et de tablettes Windows 7.

Selon des prévisions d'analystes, Apple devrait vendre 21 millions de tablettes en 2011, une progression de près de 50 %, malgré cette nouvelle concurrence. Et naturellement, l'écosystème mis en place par Apple avec ses appareils mobiles, ses ordinateurs personnels et ses logiciels devraient lui permettre de hausser ses ventes de MacBook et d'iPod, par le fait même.

Microsoft, le challenger?

Dans ce contexte, plusieurs opposent Google à Apple, dans une rivalité où l'innovation semble la clé. Or, il faudrait peut-être considérer davantage le numéro un déchu, Microsoft, dans ce rôle de challenger. C'est du moins l'avis qu'on commence à entendre de plus en plus fréquemment dans l'industrie. C'est aussi ce que résume ce matin le collègue Frederic, de ReadWriteWeb, sur son blogue personnel.

D'abord, quoi qu'on en dise, Microsoft vend plus de copies de Windows 7 qu'elle n'a vendu des versions précédentes de son système d'exploitation. Et si le mouvement vers les tablettes iPad semble freiner les ventes des ordinateurs ultraportables, comme l'indiquent les statistiques récemment publiées à ce sujet, ça ne signifie pas le même genre de ralentissement pour Windows : après tout, ce système est aussi appelé à être installé sur des tablettes.

Le lancement d'Internet Explorer 9 devrait témoigner du souci de Microsoft de se réaligner sur les nouvelles priorités de ce marché : ce fureteur est prêt pour les écrans tactiles, ainsi que pour les nouvelles normes du Web mobile, incluant la norme HTML5, par exemple.

La semaine prochaine, Microsoft Canada fera la démonstration de son nouveau système mobile, Windows Phone 7. À en juger par l'interface du baladeur Zune HD et du prototype de téléphone que HTC a créé pour Microsoft en début d'année, Windows Phone 7 devrait se positionner comme un choix de rechange très crédible tant au iPhone qu'aux produits Android. Ces deux-là semblent se copier sans gêne, alors que Windows Phone 7 est un système original.

Avec les outils dans le nuage mis en place par Microsoft au fil de la dernière année (incluant le service SkyDrive, gratis, mais plus généreux que MobileMe du côté d'Apple), Windows Phone 7 pourrait faire dérailler les projections qui placent Android au sommet des téléphones intelligents d'ici cinq ans.

En fait, Microsoft semble mieux équipée qu'Apple pour faire face à la concurrence de Google. Bing marque des points sur une base régulière (le moteur de recherche de Microsoft n'arrive toutefois pas à voler des parts de marché à Google, par contre). Malgré ce qu'on en dit, Hotmail demeure parmi les services de courriel les plus populaires sur le marché. Windows Live Messenger est le service de messagerie texte, sonore et vidéo le plus utilisé dans le monde.

Naturellement, Microsoft n'est pas à l'abri des erreurs. On peut citer le Kin, un projet de téléphonie mobile mort-né. Et l'échec de Windows Vista est encore tout frais à la mémoire de nombreux acheteurs de PC...

Bref, une chose semble faire l'unanimité auprès des observateurs : Apple devrait battre des records encore en 2011, et continuera de dominer le secteur technologique. Microsoft, pour sa part, semble bien outillée pour lui livrer une rivalité digne d'un aspirant au trône plus que coriace. De 1990 à 2010, c'est le monde à l'envers!