L'équipementier télécoms Motorola, après avoir accumulé les pertes faute d'avoir pris à temps le virage des téléphones mobiles multifonctions, a remis sur les rails un projet de scission au terme duquel la gamme grand public prendra son indépendance par rapport aux équipements professionnels.

Les deux sociétés créées, qui devraient se scinder au premier trimestre 2011, continueront à utiliser la marque Motorola.

Les dirigeants garderont leurs responsabilités actuelles, à part le codirecteur général Sanjay Jha, embauché à l'été 2008 pour prendre la tête de la division téléphones portables en vue d'une scission envisagée alors pour 2009, qui se voit confier en plus la responsabilité des équipements pour la maison (décodeurs vidéo).

M. Jha a expliqué que ces deux activités étaient «hautement complémentaires» et que les réunir permettrait d'être «positionné au mieux pour être leader dans la convergence de la mobilité, des médias et de l'internet», et permettre la consommation de vidéos sur portables.

L'autre directeur général, Greg Brown, garde les activités professionnelles qui regroupent les talkie-walkies et lecteurs de codes-barres, ainsi que les équipements pour les réseaux de téléphonie.

«Nous pensons que cette structure fournit une grande flexibilité opérationnelle et stratégique aux deux sociétés, les positionne pour le succès et renforce la valeur à long terme pour les actionnaires», a fait valoir le président du conseil d'administration, David Dorman.

Le marché a salué cette annonce, faisant s'envoler le titre de 3,76% dans les échanges électroniques après la clôture de la Bourse de New York, à 6,90 dollars.

Pourtant tous les analystes ne sont pas convaincus par la solidité des activités grand public.

«Nous ne pensons pas que les activités dans le portable et (les décodeurs) soient complémentaires, et il est plutôt probable que Motorola pense que l'ajout des équipements pour la maison (aux téléphones portables) (...) permette d'absorber les pertes et de renforcer l'entité indépendante», faisait valoir l'analyste Hale Holden chez Barclays Capital.

Concrètement la scission devrait s'effectuer par une distribution d'actions au prorata, sans que les actionnaires aient à se prononcer.

Le groupe a expliqué que chacune des deux sociétés serait «bien capitalisée» et riche d'un solide portefeuille de brevets. La marque Motorola sera la propriété de la société chargée des équipements grand public, mais la société des équipements professionnels l'utilisera sans frais.

La taille respective à terme des deux entités était difficile à établir dans l'immédiat.

En 2009 les appareils portables ont réalisé des ventes de 7,146 milliards de dollars (-41% sur un an), et les équipements professionnels, hors équipement pour réseaux de téléphonie, de presque autant à 7,008 milliards (-13%).

L'activité de décodeurs et d'équipements pour réseaux téléphonies était jusqu'à présent confondue et totalisait pour 7,963 milliards de dollars de ventes annuelles en 2009 (-21%).

L'opération est une reprise modifiée du projet de scission initialement lancé début 2008, qui avait été reporté en raison de la rapide dégradation de l'activité des téléphones portables, en panne de best-seller depuis le lancement de l'élégant RazR en 2005, bien avant l'irruption de la mode des «smartphones», les téléphones multifonctions.

Motorola attendait que l'activité des téléphones portables soit redressée et bénéficiaire.

Jeudi soir, M. Jha a concédé que ce n'était pas encore le cas (perte de 1,077 milliard de dollars en 2009, dont 132 millions au dernier trimestre), mais il table déjà sur un retour dans le vert au quatrième trimestre.

Il a assuré qu'avec l'accent mis sur le segment des «smartphones», et la sortie programmée cette année de 20 appareils sous Androïd, le système d'exploitation de Google, le redressement était en bonne voie.