La concurrence que se livrent Montréal et Toronto pour attirer des événements culturels et sportifs d'envergure cache un malaise qui va bien au-delà de la sphère festivalière. Car même dans l'industrie des technos, on trouve que la métropole québécoise n'est pas reconnue à sa juste valeur ni par Québec, ni par Ottawa.

La concurrence que se livrent Montréal et Toronto pour attirer des événements culturels et sportifs d'envergure cache un malaise qui va bien au-delà de la sphère festivalière. Car même dans l'industrie des technos, on trouve que la métropole québécoise n'est pas reconnue à sa juste valeur ni par Québec, ni par Ottawa.

Pour développer une économie florissante, il faut diverses formes d'investissement: du capital de risque, du financement traditionnel et des subventions. Les trois se complètent, puisqu'ils arrivent à des moments différents du cycle de démarrage d'une entreprise.

Le Fonds d'expérimentation en multimédia (FEM) est un exemple de subvention gouvernementale qui contribue à faire de Montréal un centre vital de ce secteur émergent des TIC. Il dispose d'une enveloppe d'environ cinq millions de dollars et aide au prédémarrage de petites entreprises. C'est un programme fédéral géré par l'Alliance NumériQc. Malheureusement, ce Fonds n'a pas été renouvelé en 2007. Développement Économique Canada a éliminé ce programme au profit de «ses nouvelles priorités».

À Québec, le ministère du Développement économique, de l'Innovation et de l'Exportation offre un programme d'aide aux entreprises qui finance des études de marché, l'acquisition de brevets, ce genre de choses vitales pour les entrepreneurs qui passent de la R&D à une première commercialisation de leur produit. Sauf que depuis un an, ce programme est limité de façon non officielle aux entreprises qui possèdent déjà un chiffre d'affaires de plus d'un million de dollars par an.

Deux programmes qui aident les technos montréalaises à se développer depuis des années. Deux programmes qui sont, aujourd'hui, disparus, sinon plus restrictifs qu'il y a un an. Si on espère soutenir l'industrie, on ne va clairement pas dans la bonne direction «C'est malheureux, car c'est exactement le genre d'aide que ça prend pour encourager la créativité de l'industrie montréalaise et générer de nouvelles entreprises», déplore Serge Bourassa, président du président du Centre d'entreprises et d'innovation de Montréal (CEIM).

Montréal, Boston, Hong Kong

«Car en tant que pôle technologique, Montréal ne doit pas être vue comme étant en compétition avec les autres régions du Québec, ni même avec Toronto ou Vancouver, mais avec d'autres villes des États-Unis et d'ailleurs dans le monde», ajoute M. Bourassa. «Les programmes d'aide gouvernementaux doivent aller dans ce sens-là. Il faut voir les immenses moyens financiers dont dispose la Chine pour aider ses incubateurs technologiques!»

Un avis que partage Lyne Bouchard, directrice générale de l'organisme TechnoMontréal. «On trouve les leviers économiques de Montréal petits comparativement à Toronto, mais ils sont microscopiques quand on regarde ce qui se fait à Boston, à San Francisco, à Hong Kong ou ailleurs.» C'est malheureux, car dans les TIC du moins, les villes sont devenues des pôles de développement économique presque plus importants que les provinces ou les états dans lesquels ils se trouvent.

Par exemple, si une multinationale étrangère cherche à percer le marché nord-américain, elle magasinera pour une ville où les conditions idéales sont réunies: main-d'oeuvre disponible, coûts d'opération peu élevés et proximité des partenaires et des clients. «À l'étranger, quand on pense aux États-Unis, on pense automatiquement à la Silicon Valley et à Boston (avec le MIT à proximité et ses huit méga-hôpitaux)», ajoute Mme Bouchard. «Le Canada n'est pas perçu comme une grande nation technologique, parce que ses grandes villes ne sont pas reconnues comme tel.»

Autrement dit, critiquer le manque d'offensive de Montréal envers la Ville Reine n'est pas la marche à suivre, car la compétition est ailleurs. «La vraie question est: comment Montréal peut-elle s'allier avec Toronto pour mieux faire connaître le Canada?» se demande Lyne Bouchard. Et, du même coup, comment rallier Québec et Ottawa à sa cause?