Alors que la France interdit l'utilisation du BlackBerry dans les hautes sphères politiques pour des raisons de sécurité nationale, le petit appareil noir est plus présent que jamais dans les couloirs du parlement canadien. Malgré de sérieux avis de sécurité publiés en 2002, Ottawa ne semble pas s'inquiéter de la possibilité que le gadget numérique permette des fuites de renseignements secrets.

Alors que la France interdit l'utilisation du BlackBerry dans les hautes sphères politiques pour des raisons de sécurité nationale, le petit appareil noir est plus présent que jamais dans les couloirs du parlement canadien. Malgré de sérieux avis de sécurité publiés en 2002, Ottawa ne semble pas s'inquiéter de la possibilité que le gadget numérique permette des fuites de renseignements secrets.

Créé par la firme canadienne Research in Motion (RIM), le BlackBerry est un assistant numérique personnel qui sert à la fois de téléphone cellulaire et d'appareil pour transmettre des courriels. Depuis le début des années 2000, son utilisation a littéralement explosé dans les ministères.

Or, en France, une note du secrétariat général de la Défense nationale publiée il y a 18 mois et rééditée cette semaine interdit l'utilisation de l'appareil dans les cabinets ministériels de Matignon et de l'Élysée.

Cité par Le Monde, le haut responsable de l'Intelligence économique au gouvernement et ex-directeur des services de renseignement français, Alain Juillet, justifie cette décision en affirmant que l'appareil pose un sérieux «problème de sécurisation des données».

Selon le quotidien parisien, les craintes des autorités françaises sont liées au fait que tous les courriels envoyés et reçus par les terminaux BlackBerry transitent obligatoirement par les serveurs de RIM, situés en Grande-Bretagne et au Canada.

Puisqu'ils n'ont pas de pouvoir sur ces serveurs, les services secrets redoutent que le réseau d'interception de communications de la National Security Agency (NSA) américaine, avec qui RIM fait affaire depuis des années, puisse espionner l'action du gouvernement.

La firme canadienne s'est empressée de réfuter ces allégations. L'entreprise assure que les données qui transitent par ses appareils sont entièrement cryptées. Selon Michel Juneau-Katsuya, ancien agent du Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS), les craintes soulevées par la France ne sont pas nécessairement gratuites.

«Il faut savoir que toute forme de télécommunication peut facilement être interceptée ,et la France et les États-Unis sont très engagés l'un contre l'autre dans l'espionnage électronique.»

«Que RIM affirme que ses données sont cryptées, c'est bien beau, mais quand on sait que le gouvernement Bush a fait adopter, pour des raisons de sécurité nationale, un article de loi obligeant toutes les compagnies américaines à fournir au gouvernement leurs clés de cryptage, il y a de quoi se poser des questions», ajoute M. Juneau-Katsuya.

Rapport inquiétant

En 2002, un rapport de vulnérabilité du Centre de la sécurité des télécommunications (CST) canadiennes traitant de l'utilisation du BlackBerry par les hauts fonctionnaires fédéraux a conclu que l'appareil «n'assure pas une sécurité de bout en bout pour l'envoi d'un message entre deux utilisateurs».

Dans sa conclusion, le CST recommande en outre de ne jamais apporter les BlackBerry «dans des zones où de l'information sensible est traitée ou fait l'objet de discussion».

Selon la politique d'utilisation des réseaux électroniques édictée par le Conseil du Trésor, il est toutefois interdit aux employés gouvernementaux de faire transiter des «données ou documents délicats» à l'aide d'appareils électroniques semblables, précise le porte-parole Pierre-Alain Bujold.

À lire aussi:

France: le BlackBerry banni au gouvernement

BlackBerry en France: vives réactions