«On n'a pas la même notoriété que Nortel, c'est clair. Avec nos 35 employés, on n'est même pas sur leur radar. Mais est-ce qu'on a une meilleure technologie qu'eux ? On pense que oui.»

«On n'a pas la même notoriété que Nortel, c'est clair. Avec nos 35 employés, on n'est même pas sur leur radar. Mais est-ce qu'on a une meilleure technologie qu'eux ? On pense que oui.»

Celui qui s'exprime ainsi, c'est Gaétan Campeau, président et l'un des sept fondateurs de TelcoBridges. Cette entreprise de Boucherville fabrique des commutateurs permettant aux lignes terrestres, aux sans-fil et aux téléphones Internet de parler le même langage, peu importe le continent.

La grande innovation de TelcoBridges, c'est d'avoir réussi à mettre sur une seule carte de 48 cm (19 pouces) sur 48 cm des circuits permettant d'acheminer plus de 2000 appels simultanément. Pour la même surface, c'est quatre fois plus que son plus proche concurrent visant le même marché.

En reliant 16 de ces cartes, on obtient un commutateur d'environ 60 cm de haut capable de traiter 32 000 appels en même temps. «Chez Nortel, un produit équivalent occuperait l'espace d'une petite salle de conférence», souligne le président, très fier du travail accompli par l'équipe.

D'ailleurs, après moins de deux ans d'existence, TelcoBridges a remporté en 2004 le prestigieux concours des Mercuriades dans la catégorie Innovation technologique.

Réalisant la quasi-totalité de son chiffre d'affaires à l'étranger, l'entreprise privée traite avec une cinquantaine d'équipementiers dans une vingtaine de pays, surtout en Asie.

La plateforme de TelcoBridges lui permet aussi d'intégrer divers services, comme la reconnaissance de la parole, les systèmes de réponse vocale interactive et une amusante fonction de tonalité de retour personnalisé (ringback tunes).

Très populaire en Asie, cette fonction permet à un abonné de définir la tonalité qu'entend chacune des personnes qui l'appellent (jusqu'à ce qu'il réponde). «Là-bas, quand on veut faire plaisir à un ami, on lui fait entendre une de ses chansons préférées quand il compose notre numéro», explique Gaétan Campeau.

Fin janvier, TelcoBridges a annoncé qu'avec sa technologie, un équipementier de Pékin a pu doubler la capacité du service de tonalité personnalisé d'une filiale de China Mobile. Jusqu'à 71 000 abonnés pourraient recevoir un appel en même temps et chaque demandeur entendrait la sonnerie ou le message choisi pour lui par l'abonné.

À l'échelle de la planète, la PME compte seulement six concurrents qui, comme elle, visent les petits et moyens équipementiers, c'est-à-dire ceux qui achètent leur technologie au lieu de la développer eux-mêmes, comme le fait Nortel.

Ces équipementiers représentent déjà un marché de 350 millions de dollars. Mais à la différence de ses concurrents, TelcoBridges offre une plateforme modulaire très extensible, qui ne la confine pas à ce créneau.

«Il faut faire nos preuves. Peu de choses comptent plus que la fiabilité dans ce marché», souligne Gaétan Campeau. Heureusement, le bouche-à-oreille fonctionne très bien. Ainsi, l'entreprise vient de signer l'un de ses plus gros contrats en Californie grâce à la recommandation d'un client en Asie.

Les sept fondateurs travaillent toujours pour la compagnie (sauf un, pour des raisons de santé). Bonjour la zizanie ? Gaétan Campeau étend ses bras sur la table. «Je touche du bois. Il n'y a pas de chicane. Ce qu'on a, c'est vraiment un effort collectif et des objectifs communs», affirme-t-il.

Tant mieux, car quand on lui demande à quoi ressemble l'avenir de TelcoBridges, on sent l'anticipation des gros projets. «Les affaires vont bien et on s'attend à continuer de croître dans la prochaine année», se contente-t-il de répondre, avec un large sourire.

Des débuts audacieux

L'entreprise a signé son premier contrat avant même d'être fondée. Les sept fondateurs de TelcoBridges ( tous des anciens employés d'une société de haute technologie ) se sont réunis en août 2002 pour discuter de l'idée de partir une entreprise.

«Je leur ai dit : j'embarque. Mais pas question de faire un trip d'ingénieurs», se rappelle Gaétan Campeau. Il fallait d'abord vérifier si, après l'éclatement de la bulle techno, il restait des gens dans le monde avec des projets ou si le marché était totalement déprimé. Chacun a alors activé son réseau de contacts. Deux mois plus tard, deux des fondateurs sont partis rencontrer un client potentiel à Hong Kong. Ils sont revenus avec un contrat et un chèque, alors que l'entreprise n'avait même pas de compte bancaire ni même de bureau. Juste un site Web de deux pages et beaucoup de confiance dans sa capacité de livrer la marchandise!