La machine a nettement battu l'homme: le logiciel allemand Deep Fritz, considéré comme le meilleur programme d'échecs actuel, a remporté mardi la sixième et dernière partie du match contre le champion du monde, le Russe Vladimir Kramnik, qui perd ainsi un pari à haut risque.

La machine a nettement battu l'homme: le logiciel allemand Deep Fritz, considéré comme le meilleur programme d'échecs actuel, a remporté mardi la sixième et dernière partie du match contre le champion du monde, le Russe Vladimir Kramnik, qui perd ainsi un pari à haut risque.

Kramnik, âgé de 31 ans, s'est incliné avec les noirs dans la dernière partie à l'issue de cinq heures de bataille, en 47 coups, après avoir tenté une défense sicilienne. Il perd ainsi le tournoi, dont il n'a pas remporté une seule partie, sur le score final de 4 à 2 - une victoire valant un point et une partie nulle un demi-point.

La semaine dernière, Deep Fritz avait déjà remporté la deuxième partie, il est vrai à cause d'une surprenante faute d'inattention de Kramnik, mat au 35e coup. Les autres rencontres s'étaient soldées par des nuls.

De l'avis des experts échiquéens présents à Bonn, la prestation de Kramnik tout au long des six parties n'a cependant rien eu de ridicule, le Russe ayant montré la plupart du temps qu'il pouvait tenir tête au programme, mis au point par la société informatique allemande Chessbase.

Kramnik, rémunéré 500 000 dollars par les organisateurs pour cette manifestation, pouvait espérer doubler ce gain en cas de victoire contre le logiciel, mais cet espoir s'était avéré vain dès la cinquième partie.

Dès le départ, le défi semblait de toute façon périlleux pour le champion russe, qui n'avait déjà pas fait mieux que le nul, en 2002 à Bahrein, lors d'une confrontation en huit parties contre une précédente version de Deep Fritz... alors bien moins puissante que sa version 2006.

De l'aveu même de Kramnik, l'actuel Deep Fritz est plus de deux fois plus rapide que sa version de 2002. Il peut examiner huit à dix millions de positions par seconde. Kramnik avait d'ailleurs reconnu, avant le début de la rencontre, que son adversaire était «clairement favori».

«Le monstre fait constamment l'objet d'améliorations, mais je crois que je peux encore lutter contre cet adversaire incroyablement fort», avait-il affirmé. Contre un logiciel, avait-il souligné, «tu n'as pas le droit de commettre la moindre erreur tactique, car tactiquement, l'ordinateur est imbattable. Si tu commets la plus petite erreur, il te la fait payer immédiatement».

Cette victoire de l'intelligence artificielle survient plus de neuf ans après la défaite historique de la légende russe des échecs Garry Kasparov contre le super-ordinateur Deep Blue, en mai 1997 à New York. A l'époque, le champion, alors invaincu par des humains depuis 12 ans, s'était incliné en six parties. Il avait toutefois affirmé après sa défaite que «l'ordinateur (n'avait) encore rien prouvé» et que «la compétition ne (faisait) que commencer».

La victoire mardi de Deep Fritz face à l'actuel maître incontesté de la planète échiquéenne - Kramnik, champion du monde «classique» depuis 2000, a également conquis en octobre le titre de champion du monde de la Fédération internationale d'échecs (FIDE) -, rend cependant de moins en moins probable l'organisation future de tels chocs au sommet entre l'homme et la machine.

Au vu de la rapidité du progrès technique et de la puissance de plus en plus impressionnante des outils informatiques, les experts considèrent en effet la victoire des humains comme de moins en moins plausible.