La récente loi américaine qui interdit les jeux de hasard en ligne risque de porter un dur coup à la florissante industrie des casinos virtuels de Kahnawake.

La récente loi américaine qui interdit les jeux de hasard en ligne risque de porter un dur coup à la florissante industrie des casinos virtuels de Kahnawake.

«Kahnawake va clairement être frappé par cette loi», estime l'avocat Anthony Cabot, de Las Vegas, spécialisé en droit des jeux de hasard en ligne. «Plusieurs casinos de la réserve vont cesser d'accepter des clients américains.»

C'est aussi l'avis d'une source de Valeurs mobilières Desjardins, société qui avait révélé il y a un peu plus d'un an que la réserve mohwak était devenue le plus important hôte de casinos virtuels au monde, avec des centaines de sites.

Selon VMD, la part du lion du trafic sur les sites de Kahnawake vient d'Amérique du Nord, les compagnies de jeu du continent exploitant la situation légale ambiguë de l'hôte Mohwak Internet Technologies (MIT).

En effet, si les casinos en ligne ne sont pas permis au Canada, MIT ne fait que les héberger, ce qui ne la met pas clairement hors la loi. Les Mohwaks se réclament en plus de leurs droits ancestraux pour œuvrer dans l'industrie des jeux de hasard.

Mais le marché qui s'est développé à la faveur du flou ainsi créé pourrait être sérieusement compromis par le resserrement de la législation américaine.

En adoptant samedi sa loi prohibant les casinos en ligne, le gouvernement américain a manifesté son intention de contrôler les transactions grâce aux sociétés financières qui voient passer les chèques et paiements par cartes de débit et de crédit.

«On est encore en train d'étudier la situation, tout ça est très soudain», rapporte Chuck Barnett, membre du conseil d'administration de Mohwak Internet Technologies.

Il concède que la loi risque de rendre les paiements des dépenses des joueurs plus difficiles à compléter, mais ne veut pas se prononcer à ce stade-ci sur son impact potentiel sur les affaires.

Au Canada comme aux États-Unis, les titres des compagnies publiques de jeu en ligne ont réagi lundi par des chutes brutales.

Le fabricant de logiciels de jeu de hasard virtuels CryptoLogic, de Toronto, a plongé de 19,3 % ou 4,76 $.

Son homologue Las Vegas From Home, de Vancouver, a clôturé en baisse de 0,02 $ ou 16,7 % à la Bourse de Croissance.

ESI Entertainment Systems, de Colombie-Britannique, a cédé 15,4 % ou 0,40 $. Cette compagnie fournit des comptes de paiement aux joueurs-internautes.

Toutes trois dépendent lourdement de leur clientèle américaine. Selon Valeurs Mobilières Desjardins, le tiers des revenus de CryptoLogic, et le quart de ceux de Las Vegas from Home, proviennent des États-Unis. ESI est encore plus vunérable, brassant la quasi-totalité de ses affaires au sud de la frontière.

Desjardins réserve pourtant son jugement quant à l'impact réel de la loi sur ces entreprises, dont elle a simplement placé les titres sous observation.

«Nous avons plus de questions que de réponses à l'heure actuelle», indique l'analyste David Shore, de Desjardins.

M. Shore se questionne sur l'application de la prohibition, s'attendant notamment à ce que les institutions financières américaines protestent contre le fardeau de surveillance que le gouvernement s'apprête à leur imposer.

Il souligne que l'Italie, qui avait tenté plus tôt cette année d'interdire le jeu en ligne, vient de faire volte-face devant la difficulté de la tâche et a choisi de plutôt le réglementer.

Dans le même sens, l'avocat Anthony Cabot doute de l'efficacité de la nouvelle loi américaine, même si elle nuira selon lui aux compagnies actives en ce moment dans le secteur.

«Il y aura toujours des entrepreneurs intelligents pour trouver des moyens de contourner la règle et faciliter les paiments, croit-il. Toute tentative gouvernementale de réglementer ce qui se fait sur Internet est vouée à l'échec.»

La prohibition du jeu en ligne a pour but d'empêcher l'industrie des casinos d'étendre sa clientèle outre-mesure et de rejoindre des citoyens vulnérables, explique M. Cabot.

Elle émane selon lui des pressions de la droite religieuse américaine qui, dit-il, s'est organisée pour la faire passer samedi en même temps qu'une autre loi complètement différente, sur la sécurité maritime, de manière à éviter la controverse et l'opposition.