«On perd vite le contrôle» : Myriam Toulza, 21 ans, est encore secouée par le premier essai d'un prototype de scooter virtuel, une expérience brutalement achevée dans un crash et une rafale de photos-chocs, succession de corps mutilés et visages affolés d'accidentés de la route.

«On perd vite le contrôle» : Myriam Toulza, 21 ans, est encore secouée par le premier essai d'un prototype de scooter virtuel, une expérience brutalement achevée dans un crash et une rafale de photos-chocs, succession de corps mutilés et visages affolés d'accidentés de la route.

Le scooter virtuel, «simulateur des dangers de la route» mis au point par une équipe d'étudiants de l'Ecole nationale supérieure des arts et métiers (Ensam) à Paris, sous la direction du professeur de génie industriel Simon Richir, était testé pour la première fois jeudi par un novice.

Il vise à créer «un choc émotionnel» gradué en fonction de la gravité des accidents déclenchés par le conducteur, explique M. Richir. «Ce n'est pas un jeu vidéo et ce n'est pas non plus un simulateur pour apprendre à conduire».

Ses concepteurs, soutenus par une entreprise de Laval (Mayenne) nommée Nautilus qui espère entamer la construction en série de l'engin dès 2007, entendent convaincre pouvoirs publics et compagnies d'assurance d'équiper les collèges de ces scooters virtuels.

«Virtual Scooter» est destiné aux 14-17 ans, la tranche d'âge majoritaire chez les conducteurs de deux-roues. Des adolescents souvent peu conscients des dangers de la route et «des effets irréversibles que peut entraîner une négligence», note M. Richir.

Selon les derniers chiffres disponibles, 1 400 jeunes de 14 à 17 ans ont été tués en 2004 dans des accidents de deux-roues en France, 6 000 ont été grièvement blessés et 25 000 plus légèrement.

D'où les photos volontairement choquantes qui se déversent en cas de crash à deux centimètres des yeux du conducteur, dans les mêmes lunettes-écran qui l'ont immergé dans un monde virtuel de rues plus ou moins étroites, sens interdits, priorités à droite, piétons imprudents et voitures imprévisibles.

Impossible d'y échapper. Images de scooters tordus, de chairs à vif, de membres cassés, d'enfants hurlant, paniqués... «C'est très dur, ça choque», souligne Myriam, qui n'avait jamais conduit de scooter avant cette expérience.

«Mais c'est nécessaire, il vaut mieux que ce soit virtuel que réel», ajoute l'étudiante en arts. Myriam tenait à contribuer au projet, elle qui a perdu une amie proche dans un accident de moto.

Les quatre étudiants en master professionnel, Alexandre Boursier, Gill van Herzele, Didier Desmongles et Alexandre El Ayoubi, veulent ajouter à leur engin les rétroviseurs qui manquent cruellement à la conduite. Mais cela signifie un nombre impressionnant de calculs supplémentaires à réaliser et implique l'ajout d'un, voire deux ordinateurs.

En l'état, Virtual Scooter est composé d'un deux-roues dont les principales commandes (accélérateur, freins, guidon) sont reliées à un ordinateur, un simple PC haut de gamme doté d'une solide carte graphique.

La machine calcule en permanence la situation du scooter et celle des autres objets intelligents (voitures et piétons) dans une ville virtuelle de petite taille qui rappelle l'île Saint-Louis, et traduit ces données en images transmises aux lunettes-écran.

Les images que l'on veut, car Virtual Scooter est paramétrable à gré : pour des collégiens en monde rural, par exemple, on peut remplacer la ville par des routes de campagne, avec leurs dangers.