On ne pouvait arrêter Jerome Bettis. Il roulait sous les plaqués. Il plongeait par-dessus un amoncellement de joueurs. Il se moquait des casques protecteurs des défenseurs qui lui barraient le chemin. Il était non seulement le demi offensif étoile des Steelers de Pittsburgh, mais aussi une infatigable machine à réussir des touchés...

On ne pouvait arrêter Jerome Bettis. Il roulait sous les plaqués. Il plongeait par-dessus un amoncellement de joueurs. Il se moquait des casques protecteurs des défenseurs qui lui barraient le chemin. Il était non seulement le demi offensif étoile des Steelers de Pittsburgh, mais aussi une infatigable machine à réussir des touchés...

Éventuellement, il devait quitter son divan et retourner vers le monde réel. C'est à ce moment que le vrai Jerome Bettis a déposé sa manette de jeu et qu'il a définitivement abandonné le jeu vidéo de football Madden NFL. «J'ai dû complètement abandonner ce jeu il y a trois ans tellement j'étais devenu accro. Je jouais le matin, en soirée, dans tous mes moments libres. Je me suis alors dit que j'avais d'autres choses à faire dans la vie», explique-t-il.

Depuis 2001, Madden NFL est le jeu vidéo le plus vendu sur la planète. Même les joueurs de la NFL en sont obsédés et certains de ceux qui se plaignent directement à John Madden sont furieux quand ils estiment que le jeu sous-évalue leurs qualités. Le quart-arrière Michael Vick, des Falcons d'Atlanta, s'est récemment plaint à la compagnie Electronic Arts que c'était lui, et non Randy Moss, des Raiders d'Oakland, le joueur le plus rapide de la ligue. Le demi offensif Corey Dillon, des Patriots de la Nouvelle-Angleterre, a affirmé que son évaluation générale était trop faible. Et que dire du receveur Michael Clayton, de Tampa Bay, qui s'est obstiné à affirmer que son habileté à plaquer devait être supérieure... au cas, bien évidemment, qu'il doive plaquer un rival.

Le jeu Madden est devenu une référence dans le monde de la NFL, aussi bien dans le virtuel que dans la réalité.

À Jacksonville, les joueurs peuvent utiliser une console à quatre joueurs dans leur salon. Quand l'heure des réunions sonne, ils provoquent souvent une mêlée pour arriver à l'heure devant les entraîneurs. Lors des envolées de l'équipe, ils jouent l'un contre l'autre grâce à des manettes sans fil. «L'un des joueurs est assis à l'avant de l'avion et son adversaire dans l'une des dernières rangées, raconte l'ailier défensif Marcellus Wiley. Vous êtes sur le point de vous endormir quand l'un d'eux se lève d'un bond, comme projeté par un ressort, en criant : "Aucun doute mon ami, c'était une punition".»

Depuis 15 ans

Nommé en l'honneur de l'analyste à la télévision et ex-entraîneur vainqueur du Super Bowl avec Oakland, la compagnie Electronic Arts a conçu ce jeu pour huit différents types de consoles - Xbox, PlayStation et GameCube, entre autres, sans oublier la nouvelle Xbox 360. Les jeux se vendent dans une fourchette de prix allant de 30$ à 60$ et EA possèdent les droits exclusifs de la NFL au moins pour les quatre prochaines années.

Au cours des 15 dernières années, les ventes dépassent 1,5 milliard de dollars grâce aux graphiques sophistiquées et aux constantes améliorations, sans oublier la popularité du football professionnel.

Utilisant une manette ou un clavier, le joueur peut en affronter un autre sur un ordinateur et des adeptes peuvent se retrouver à des milliers de kilomètres grâce à Internet. Le joueur peut choisir tous les jeux en offensive et en défensive, puis diriger un athlète en particulier. Cette année, on peut utiliser une nouvelle fonction et suivre son joueur vedette chez le barbier ou quand il se fait tatouer...

«L'athlète qui arrive dans la NFL joue probablement à ce jeu vidéo depuis l'école primaire», explique Madden, qui participe depuis le tout début à chaque étape de l'élaboration du jeu. «Il a aussi joué pendant son secondaire et il n'a pas abandonné ce jeu lorsqu'il est passé à l'université. Devenu professionnel, il apprécie de se voir "en personne" dans le jeu et tient à y faire bonne figure.»

La firme EA a présenté sa dernière édition le mois dernier avec le lancement de la console Xbox 360. C'est la version la plus sophistiquée jamais produite. Chacun des sièges de tous les stades de la ligue sont représentés, tout comme chaque ampoule des tableaux indicateurs. Et certaines s'éteignent quand elles sont brûlées...

Des photographies en trois dimensions de la tête d'une centaine de joueurs sont disponibles. Des portraits tellement précis qu'on peut y apercevoir les cicatrices datant de l'adolescence ou une coupure résultant du rasoir. Il est aussi possible d'effectuer un gros plan qui permet de lire l'inscription derrière le casque du joueur ou de voir le chrome des plateaux de nourriture dans le salon des joueurs.

Aussi réaliste que l'est ce jeu, plusieurs joueurs de la NFL se plaignent que leurs évaluations sont inadéquates. Chaque joueur est classé selon une échelle de 1 à 99 dans plusieurs catégories: rapidité, force, agilité et vivacité. Ces pointages sont additionnés pour présenter un portrait général de l'athlète, ce qui aide à définir son efficacité dans le jeu vidéo.

«Chaque joueur me répète qu'on ne lui accorde pas assez de vitesse, mentionne Madden. Et j'apporte parfois des correctifs. Je me souviens quand Dante Hall avait connu une saison du tonnerre comme spécialiste des retours de bottés pour Kansas City. Il me taquinait avant un match, me répétant qu'il n'était assez rapide, que les joueurs de ligne étaient plus vites que lui. Même les soigneurs et médecins qui se rendent sur le terrain courent plus rapidement que moi, me disait-il. Je me suis informé et j'ai appelé les gens de la compagnie pour que soit corrigé sa rapidité.»

De fait, selon Madden, l'unique joueur de la NFL qui ait admis que son personnage dans la jeu vidéo était meilleur que lui est le demi offensif Emmitt Smith, anciennement des Cowboys et de Cards, qui s'est retiré la saison dernière.