Il a été le premier à décrocher une médaille d'or olympique au pays, mais il a été le dernier à revenir. Trente-trois jours après son triomphe historique aux Jeux de Vancouver, Alexandre Bilodeau est enfin rentré chez lui, hier.

À l'aéroport Trudeau, le bosseur de Rosemère s'attendait à être accueilli par une caméra, «peut-être deux», et quelques journalistes. C'est finalement tout un bataillon médiatique, plus ou moins discipliné, qui attendait Bilodeau, ses coéquipières Jennifer Heil et Chloé Dufour-Lapointe, et l'entraîneur Dominick Gauthier.

 

Bilodeau a sorti sa médaille, a embrassé sa famille et sa blonde dans une intimité toute relative, avant d'être happé par micros et calepins.

«C'est pas mal plus fou que je croyais!» a balancé le nouveau héros national.

Toujours aussi flegmatique, il a continué de répondre aux questions de La Presse, les bras en croix, pendant qu'un technicien de la télé installait un micro sur ses vêtements. Il a signé plusieurs autographes, dont un dans le passeport d'un garçon, à la page des tampons: «Je ne savais pas que j'étais devenu un pays.»

Une imposante délégation de Rosemère, avec à sa tête la mairesse Hélène Daneault, avait déployé une immense banderole de félicitations, qui sera accrochée à l'aréna local lors d'une fête en l'honneur du champion olympique, le 30 mars.

Alexandre a retrouvé son désormais célèbre frère Frédéric, qui arborait une nouvelle coupe de cheveux pour l'occasion, sa mère Sylvie, ses tantes, quelques cousins et cousines, et sa grand-mère maternelle, Mme Gilberte Michaud, une partisane de la première heure, qui n'a pu réfréner quelques larmes.

«C'est beaucoup d'émotions, c'est presque trop de joie, a raconté grand-maman Michaud, 80 ans, en tenant la main de Frédéric. À mon âge, je ne pense pas revivre ça. Peut-être dans quatre ans.»

Frédéric, lui, n'avait qu'une idée en tête: «J'ai hâte d'écouter un film avec Alexandre dans notre cinéma-maison.»

Si Bilodeau a occupé la majorité de l'attention, il a été magnanime et a félicité ses coéquipières Chloé Dufour-Lapointe, fantastique cinquième à Vancouver à l'âge de 18 ans, et Jennifer Heil, qui rentrait avec une valise contenant un cinquième globe de cristal, titre couronnant une saison entière.

«Un globe, c'est tellement spécial pour nous les skieurs, a confié la médaillée d'argent olympique. Ça récompense la constance. Pour moi, c'est un cinquième en 10 ans. J'ai atteint mon plus important objectif personnel.»

Béatrice Bilodeau, 16 ans et soeur cadette d'Alexandre, arborait une grosse prune sur l'arcade sourcilière gauche, gracieuseté d'une chute à l'entraînement en Espagne, avant la dernière Coupe du monde de la saison. En plus d'atteindre ses deux premières finales en Suède la semaine dernière, la jeune bosseuse a pu renouer avec son frère, qu'elle croyait bien avoir perdu dans la frénésie post-olympique.

«Tout a changé rapidement, a-t-elle expliqué. Il faisait juste sortir dans la rue et le monde se jetait sur lui. Je ne sais pas comment sa blonde a fait pour gérer ça, mais moi je commençais à être jalouse. J'ai hâte de voir comment ce sera à Montréal.»

Les bosseurs sont rentrés, mais leur saison n'est pas finie. Ils prendront part aux championnats canadiens de Calgary, la semaine prochaine.

Alexandre Bilodeau était incapable de penser si loin: «Pour le moment, je ne gère même pas de jour en jour, mais d'heure en heure.»

Il savait cependant quel était son souhait le plus immédiat: «M'asseoir sur mon divan avec mon coloc et m'ouvrir une bière.»