La machine humaine, on s'en doute, n'est pas infiniment perfectible. Les records sont de plus en plus difficiles à battre.

La performance sportive serait-elle sur le point de stagner? Dès 2027, plusieurs records du monde pourraient ne plus être améliorables dans cinq disciplines olympiques, dont le patinage de vitesse longue piste, avancent des chercheurs français. Devra-t-on modifier la devise olympique «plus vite, plus haut, plus fort» ?

«L'évolution du gain de performance entre chaque nouvelle marque est en train de régresser», indique-t-on à l'Institut de recherche biomédicale et d'épidémiologie du sport de France (IRMES). Les chercheurs y ont analysé 3263 records mondiaux de 1896 à 2007 en athlétisme, natation, cyclisme, patinage de vitesse et haltérophilie. Ils ont ainsi conçu un modèle statistique permettant de prévoir la tendance dans le futur.

On estime à 75% de leur valeur «limite» les records mondiaux établis en 1896, année de la réintroduction des Jeux olympiques, écrivent les chercheurs. Aujourd'hui, ces records auraient atteint 99% de cette valeur. Si la tendance se maintient, en 2027, la marge de progrès ne serait plus que de 0,05% pour la moitié des records. La tendance positive, en baisse depuis 40 ans, devrait se poursuivre, concluent les auteurs, parce que les améliorations des techniques d'entraînement et l'augmentation des ressources n'ont pas influencé la courbe des résultats.

«C'est accrocheur comme constat, mais j'aurais tendance à prendre cette analyse avec un grain de sel puisqu'elle n'a jamais été publiée dans un périodique scientifique. J'ai des réserves quant à la méthodologie utilisée», indique Yves Lepage, professeur au département de mathématiques et statistique de l'Université de Montréal.

Bientôt, la fin des records? Michel Portmann, entraîneur d'athlétisme et professeur retraité de kinanthropologie à l'UQAM, n'y croit pas. «Ça me fait rigoler, c'est farfelu. On peut faire dire n'importe quoi aux statistiques, ça bousille la réalité. Les records sont loin d'être arrêtés», dit Portmann, qui a entraîné Bruny Surin.

«C'est évident, au 100 mètres, on ne pourra jamais être arrivé avant d'être parti! C'est vrai que c'est de plus en plus difficile de battre des records du monde, mais on y arrive quand même, poursuit Portmann. Les athlètes sont de plus en plus grands et imposants, l'entraînement se perfectionne et les athlètes s'y investissent davantage. Les technologies, comme les chaussures de sprint, les pistes d'athlétisme et les maillots, évoluent. De nouveaux perfectionnements seront toujours à venir. Qui sait, on pourrait un jour voir un nageur avec des mains et des pieds palmés!»