Ski de Fond Canada n'a pas encore pris de décision formelle au sujet d'Alex Harvey, qui risque d'être rétrogradé à l'équipe de développement pour avoir renoncé à participer à un camp d'entraînement de trois semaines dans l'Ouest américain avec le reste de l'équipe de Coupe du monde.

Le Journal de Québec rapportait hier qu'ainsi relégué à l'équipe de développement, Harvey perdrait tout support financier pour participer aux épreuves de la Coupe du monde.

Or, ce n'est pas le cas.

«Personne n'a parlé de lui retirer son soutien financier, et personne ne lui a dit qu'il n'irait pas en Coupe du monde», a expliqué Stéphane Barrette, directeur adjoint au comité de haute performance de Ski de Fond Canada (SFC).

«L'argent qu'il perdrait en ayant un statut B (équipe de développement) serait seulement celui relié au camp d'entraînement, a ajouté l'entraîneur de Harvey, Louis Bouchard. Ça ne touche pas la Coupe du monde.»

Aucune décision finale n'a été prise, mais les entraîneurs de l'équipe nationale s'interrogent sur les exemptions dont bénéficie Harvey.

«L'an passé, Alex était encore de niveau junior et on avait jugé bon de lui donner une année de transition avant qu'il ne se conforme au programme national senior, a expliqué Barrette. Mais ça devient compliqué de faire un menu à la carte pour chaque athlète.»

Harvey bénéficie depuis cinq ans d'une exemption qui lui permet d'éviter l'entraînement estival dans l'Ouest.

Au même moment, il se rend plutôt avec les autres athlètes du Centre Pierre-Harvey sur un glacier en Autriche, entre autres pour y tester des skis.

«Alex ne manque que trois semaines de camp d'entraînement dans toute l'année, rappelle Louis Bouchard. Cette routine est comme un droit acquis. Ça marche bien pour tout le monde et les résultats sont là.»

Des ressources centralisées

En fait, ça semblait un droit acquisjusqu'à récemment.

Il y a deux semaines, le directeur de la haute performance chez SFC, Thomas Holland, a assuré Bouchard que l'exemption de Harvey serait renouvelée cette année. «Il y a eu un changement de cap une semaine après», a confié l'entraîneur.

Visiblement, on voudrait que le fondeur de 20 ans collabore davantage à la centralisation de l'association.

«À partir du moment où l'on n'a pas énormément de ressources dans le pays pour aider nos athlètes de calibre international, on veut concentrer ces ressources-là pour qu'un maximum d'entre eux en bénéficient, soutient M. Barrette.

«Et puis, rendu à un niveau international, le principe reste d'aider les meilleurs athlètes à s'entraîner ensemble pour qu'il y ait un effet d'émulation.»

Douze semaines sacrées

Ces efforts de centralisation n'ont pas échappé à Louis Bouchard, qui insiste pour que son poulain reste dans le giron du Centre Pierre-Harvey au moins 12 semaines par année.

«C'est nous qui déménageons à toutes fins pratiques dans l'Ouest. On demande juste un minimum de flexibilité. Alex tient à ses 12 semaines de présence au Québec.

«Alex est sélectionné pour toutes les Coupes du monde et les Jeux olympiques, tout cela n'est pas remis en question. Ce qui est remis en question, c'est que s'il est rétrogradé de l'équipe A à l'équipe B, ça lui enlève un statut, et ça met un terme à ses 12 semaines au Québec.»

Si l'Association empiète sur les acquis de Harvey, craint Bouchard, cela pourrait éventuellement nuire aux études du jeune athlète, qui est inscrit en droit à l'Université Laval.

«Ce n'est pas une question d'argent autant que d'équilibre de vie, affirme l'entraîneur. Alex a besoin d'être heureux avec toute l'énergie qu'il met dans ce sport-là.»

D'une exception à l'autre?

La bulle médiatique a contribué à rouvrir le dossier dans les dernières heures.

«Tom Holland est rigide avec moi depuis le début, mais les gens de son entourage lui ont fait comprendre que ça méritait d'être déposé au comité de haute performance, soutient M. Bouchard.

«Normalement, un athlète de l'équipe B ne reçoit pas d'argent. Mais dans le cas d'Alex, on pourrait s'arranger pour qu'il garde cet argent.»

Est-ce à dire que Harvey passera d'une exception à une autre?

Dans tout cela, l'athlète de 20 ans, présentement en vacances à l'étranger, n'a aucune idée que son entraîneur est parti en croisade en son nom.

Louis Bouchard ne lui a pas parlé depuis son départ.

«Alex se concentre sur les Jeux, dit Bouchard. La situation le frustre, mais ce ne sera pas long qu'il va retomber sur ses skis et s'ajuster.

«Mais c'est une niaiserie, et on ne comprend pas pourquoi ça ne se règle pas vite.»