Après Marc Gagnon, un autre ancien patineur critique les façons de faire de l'équipe canadienne de patinage de vitesse courte piste.

«Ce que je vois me lève le coeur à moi aussi», fulmine Jean-François Monette dans un long courriel qu'il a fait parvenir à La Presse après avoir lu la sortie de Gagnon, vendredi dernier.

 

Membre de l'équipe nationale pendant huit ans, Monette était classé quatrième au pays en 2007-2008. Il a été choisi patineur de l'année au Canada après ses deux médailles aux Mondiaux de 2003. Il a gagné deux médailles d'argent au relais aux championnats du monde de 2007 et 2008.

Après avoir pris part à tout l'entraînement estival, Monette a annoncé sa retraite en octobre dernier. À la croisée des chemins, il avait mal à un genou et souhaitait poursuivre ses études en notariat.

«Mais j'ai surtout arrêté de patiner parce que j'ai senti qu'on ne s'en allait nulle part, a précisé Monette en entrevue téléphonique. À la veille des Jeux olympiques de Vancouver, je devais prendre une décision. Je me suis dit: j'ai 30 ans, je ne perdrai pas mon temps pour gagner une médaille de bronze au relais.»

Contrairement à Gagnon, Monette a vécu de l'intérieur le changement de la structure d'entraîneurs ayant suivi le départ de Guy Thibault, en 2006. À titre de représentant des athlètes, il a même participé aux entrevues pour l'embauche d'un quatrième entraîneur au centre national de Montréal.

Le Coréen Jae-Su Chun a obtenu le poste, mais il a quitté moins d'un an plus tard pour rejoindre Thibault aux États-Unis, malgré les efforts de l'équipe canadienne pour le retenir.

Monette déplore la façon dont Chun a été traité. «Cette organisation a manqué totalement de professionnalisme, mais surtout de respect envers les entraîneurs», juge-t-il.

L'ancien patineur estime également que la structure à quatre entraîneurs est beaucoup trop «lourde» et «rigide». Chacun tirait la couverte vers lui et ne communiquait pas avec ses pairs, soutient Monette.

«Si tu ne t'entends pas avec un coach, tu n'as pas le choix de rester avec lui, ajoute-t-il. Il est aussi interdit d'aller chercher les services d'un entraîneur à l'extérieur de la structure. À mes yeux, un entraîneur est le capitaine du bateau, le chef d'orchestre. Il choisit les intervenants dont il veut s'entourer. En ce moment, c'est Yves qui choisit tous les intervenants.»

Sur le plan technique, Monette sentait qu'il ne bénéficiait pas des «rétroactions» suffisantes pour s'améliorer. «À un moment donné, tu dis: peux-tu me filmer, je vais le faire moi-même.»

Monette dit avoir transmis ses doléances aux dirigeants de l'équipe à maintes reprises. «Ça n'a rien changé», a-t-il soutenu.

Monette affiche peu d'optimisme en vue des Jeux olympiques de Vancouver. «C'est bien parce que la structure et les entraîneurs ne sont plus adaptés à la réalité de notre sport d'aujourd'hui que je prédis, moi aussi, aucune médaille d'or, à part celles qui pourraient nous échoir par coup de chance», conclut-il, mordant, dans son courriel.

Un entraîneur contesté

Joint plus tôt en matinée, Yves Hamelin a réitéré sa confiance au système canadien, où plusieurs spécialistes (médecin, biomécanicien, technicien, psychologue, nutritionniste, etc.) travaillent en collégialité aves les entraîneurs. «Dans tous les pays autres que la Corée, ça fonctionne comme ça», a-t-il souligné.

L'équipe féminine a cependant connu sa part d'ennuis, a néanmoins confirmé Hamelin. Le leadership de l'entraîneur-chef Martin Gagné a, en effet, été contesté toute l'année, a-t-on appris. On lui reproche surtout un manque de planification des entraînements et une organisation déficiente.

À la mi-janvier, le mécontentement était tel que les dirigeants ont dû organiser deux réunions entre les patineuses et l'entraîneur. Les deux groupes de filles ont ensuite été réunis, sous la direction commune de Gagné et Sébastien Cros, l'entraîneur de l'équipe de développement qui fait davantage l'unanimité.

Peu avant les Mondiaux de Vienne, Gagné, manifestement vexé, a décidé de retirer Kalyna Roberge et Anne Maltais, ses deux patineuses, pour les intégrer au groupe des hommes. L'expérience ne fut pas un succès et s'est terminée par une engueulade.

Mis en congé pour des raisons de santé, Gagné n'a pas accompagné l'équipe en Autriche. «C'était pour le bien de l'équipe et le bien de Martin parce que ça ne fonctionnait pas», a précisé Hamelin, qui préférait ne pas s'étendre sur le sujet.

Sébastien Cros assurera la relève au retour des patineuses le mois prochain. Il sera secondé par le préparateur physique Bruno Durand.