Finalement, la Corse n'a pas été l'hécatombe appréhendée. À part la première étape, l'incident de l'autobus et les chutes qui ont suivi, tout le monde rentre à Nice en un seul morceau.

Aucun favori n'a perdu de temps, et les trois étapes ont livré des finales haletantes, couronnant des gagnants inattendus sans être des premiers venus.

Comme Simon Gerrans, lundi après-midi à Calvi, qui s'est joué du fantasque Peter Sagan en conclusion de cette troisième étape du Tour de France, la dernière de ce triptyque corse inédit dont on entendra parler longtemps.

Parfaitement emmené par son coéquipier Daryl Impey, Gerrans a signé sa deuxième victoire sur la Grande Boucle après celle de 2008. «Je pense que j'ai surpris beaucoup de monde, y compris moi-même», a admis le puncheur australien, champion en titre du Grand Prix de Québec.

Le chauffeur de sa formation Orica-GreenEdge lui saura gré d'avoir fait passer son couac de samedi au second plan...

Gagnant la veille à Ajaccio, le Belge Jan Bakelants s'est bien défendu sur ce parcours de 145,5 km, accidenté et sinueux, pour conserver son maillot jaune de leader.

Un rôle plus effacé pour Veilleux

En échappée dimanche dans les montagnes et auteur d'un dépannage crucial de son coéquipier Pierre Rolland, David Veilleux a joué un rôle plus effacé sur la route de Calvi.

Il s'est quand même montré aux premières loges dans le col de Marsolino, à 15 km de l'arrivée, alors qu'il remontait Rolland, prêt à partir à la défense de son maillot à pois de meilleur grimpeur.

Son devoir accompli, le cycliste de Cap-Rouge s'est simplement laissé glisser à 1,5 km du sommet. Il est rentré tranquille dans un second groupe d'attardés, cinq minutes après Gerrans.

«Il n'y a pas de stress pour moi de finir l'étape comme ça, a rappelé Veilleux, le maillot barbouillé de sel. J'aurais pu finir devant, mais ça n'aurait rien donné. On n'a pas de sprinters, Pierre a attaqué, il faisait son effort tout seul. Pierre a des ambitions au général et ça se joue la dernière semaine. C'est là qu'il va falloir être le plus costaud.»

Invité à commenter son rendement sur ses trois premiers jours au Tour, il a fait dévier le tir sur les ambitions collectives d'Europcar. La formation française a été à l'attaque tous les jours (encore Cyril Gautier lundi) et quitte l'Île de Beauté avec le maillot à pois dans ses bagages.

«Ça nous a permis de prendre des repères au niveau du fonctionnement de l'équipe avec Pierre, a relevé Veilleux, désormais 117e au général. Je pense qu'on est partis sur de bonnes bases pour le reste de la course.»

Le contre-la-montre par équipe de mardi à Nice sera un test pour Europcar, qui voudra simplement faire perdre le moins de temps possible à son leader. Moins d'une minute?

«Aucune idée», a répondu le Québécois, incapable de chiffrer avec précision la perte anticipée sur 25 km.

Somme toute, la Corse a été un succès sur toute la ligne. «Je ne sais pas si c'est parce qu'on avait tellement peur que ça n'a pas été si chaotique que ça, s'est demandé l'étudiant en génie mécanique. Ç'a été dur par moments [lundi], mais ça n'a pas été aussi dur que ce à quoi je m'attendais. On a toujours été bien placés. On n'a pas été dans le trouble.»

Cela lui a permis d'apercevoir quelques drapeaux québécois déployés sur le bord de la route et même une pancarte «Allez David» qui le suit depuis Bastia.

La recrue de 25 ans a maintenant trois étapes du Tour de France dans son escarcelle: «J'ai de l'expérience, mais c'est sûr que tout le monde parle du Tour. Je ne sais pas trop où me situer, mais je pense que ça m'a juste rassuré. Je suis capable de me placer. Ce n'est pas aussi difficile que dans une classique.»

Il a poursuivi son chemin dans la cohue de l'aire d'arrivée. Un adulte sans scrupules a tenté d'arracher le bidon sur son vélo. Veilleux l'a stoppé net avant de remettre l'objet à un enfant qui attendait un peu plus loin. C'est aussi ça, le Tour.