Rafael Nadal tentait d'expliquer que le temps ne s'arrête pour personne.

«Vous ne pouvez vous battre contre l'âge, a-t-il dit, réaliste. Et vous ne pouvez pas défier le temps. Il avance toujours.»

On ne peut argumenter à ce sujet.

Néanmoins, il est plutôt étonnant de voir Nadal, de nouveau champion à Roland-Garros une semaine après avoir célébré son 32e anniversaire, et Federer, qui aura 37 ans dans moins de deux mois, qui semblent rester éternellement jeunes.

La victoire de Nadal en trois manches face à Dominic Thiem, 24 ans, en finale dimanche, a procuré à l'Espagnol un 11e titre - oui, 11e - à Roland Garros et un 17e en tournois du Grand Chelem.

Lors du précédent tournoi majeur, les Internationaux d'Australie en janvier, Federer a remporté son 20e titre en Grand Chelem.

Au tournoi majeur précédent, les Internationaux des États-Unis en septembre dernier, Nadal a mis la main sur le titre.

Et ainsi de suite. Que ce soit Federer ou Nadal, ils ont gagné chacun des six derniers tournois majeurs, égalant leur deuxième plus longue séquence de domination conjointe. Leur autre série de six titres majeurs est survenue de 2008 à 2009. Leur plus belle séquence de succès a été de remporter 11 titres majeurs consécutifs à partir des Internationaux de France en 2005, lorsque Nadal est devenu numéro 1 mondial.

«Parfois, je vois beaucoup de joueurs - même de bons joueurs, parmi les meilleurs - et ils se présentent sur le terrain contre Rafa sur terre battue, ou Roger sur ciment ou toute autre surface, et vous pouvez presque voir qu'ils ne croient pas vraiment qu'ils peuvent gagner, a expliqué Robin Soderling, qui avait créé la surprise en éliminant Nadal à Roland Garros en 2009, et Federer en 2010. Ils espèrent qu'ils vont gagner, mais ils n'y croient pas vraiment.»

C'est tout le contraire chez les dames en ce moment.

La victoire de Simona Halep (3-6, 6-4, 6-1) contre Sloane Stephens en finale, samedi, à Paris, a fait de la Roumaine classée au premier rang mondial la septième championne lors des sept derniers tournois majeurs. Une partie de l'explication peut probablement être attribuée à l'absence de 16 mois des courts de Serena Williams, qui a raté les quatre plus prestigieux tournois de la discipline parce qu'elle est devenue maman.

«L'absence de Serena pendant un an et demi a laissé la porte entrouverte. Et quelques jeunes filles en ont profité pour obtenir quelques victoires, a déclaré l'entraîneur de Halep, Darren Cahill. Au cours des deux ou trois prochaines années, le tennis féminin offrira plus de profondeur.»

Halep a décroché un premier titre majeur, tout comme Caroline Wozniacki (Internationaux d'Australie 2018), Stephens (Internationaux des États-Unis 2017) et Jelena Ostapenko (Internationaux de France 2017).

«Nous commençons à croire que n'importe qui peut gagner», a reconnu Halep.

Si les choses changent au tennis féminin, c'est le statu quo chez les hommes.

Au classement lundi, Nadal est numéro 1, suivi pas loin derrière par Federer.

«Il y a 10 ans, c'était Rafa et Roger, a déclaré Juan Martin del Potro après avoir perdu face à Nadal en demi-finale de Roland-Garros, neuf ans après avoir perdu face à Federer au même stade la compétition. Et c'est encore pareil.»

Le triomphe de del Potro aux Internationaux des États-Unis en 2009 - il a vaincu Nadal en demi-finale, puis Federer en finale - et celui de Marin Cilic au même tournoi sont les deux seules exceptions où un tournoi majeur n'a pas été l'affaire de Federer, Nadal, Novak Djokovic, Andy Murray ou Stanislas Wawrinka au cours des 13 dernières années.

Lors des 53 derniers tournois du Grand Chelem, Nadal l'a emporté 17 fois, Federer, 16, Djokovic, 12, Murray et Wawrinka, trois fois chacun.

Mais en ce moment, Murray se rétablit encore d'une opération à la hanche survenue en janvier et la date exacte de son retour au jeu est inconnue. Wawrinka revient d'une chirurgie au genou et il a perdu au premier tour à Roland-Garros. Djokovic n'est pas encore à son meilleur niveau après une opération au coude. Il a perdu en quarts de finale à Paris face à un joueur qui n'avait jamais gagné un match en Grand Chelem avant le tournoi français.

Ce qui laisse la voie libre à Federer et Nadal, plus en forme et talentueux que jamais.

«C'est la perfection. Ce sont les meilleurs joueurs au monde et ils prouvent que même si votre corps n'est plus aussi jeune, rien ne remplace le talent et la volonté, a commenté le directeur du tournoi français, Guy Forget, ancien joueur du top 10 mondial et capitaine français de la Coupe Davis et de la Fed Cup. Les jeunes joueurs sont encore à la traîne.»

Et à l'approche de Wimbledon, dont le coup d'envoi sera donné le 2 juillet, nous découvrirons si Rafa et Roger peuvent continuer à défier le temps.