Alors qu'elle s'apprêtait à disputer une troisième finale en Grand chelem cette année, Angelique Kerber a entendu la partie de l'intro où on l'a présentée comme bientôt numéro 1 du tennis féminin.

«Ça sonne encore un peu étrange», a-t-elle dit quelques heures plus tard, le trophée new-yorkais à ses côtés.

L'Allemande commence toutefois à le réaliser, elle qui a comblé un retard d'un bris au dernier set pour vaincre Karolina Pliskova et enlever un deuxième grand titre en 2016, après Melbourne.

Il y a cinq ans, c'est aussi dans la Grosse pomme que la championne de 28 ans a vécu un point tournant de sa carrière.

Elle arrivait au tournoi 92e, n'ayant jamais franchi la troisième ronde d'un tournoi majeur. Elle avait perdu d'entrée de jeu dans cinq tournois de suite et dans 10 au total, incluant les trois premières étapes du Grand chelem.

«Mon but était juste de gagner quelques matches, ce qui me donnerait une place au tableau principal en Australie», s'est rappelée la jeune femme de Brême.

Elle a atteint les demi-finales, s'y inclinant en trois sets devant celle qui allait tout rafler, Sam Stosur. En chemin, elle s'est acclimatée aux grands stades, aux foules bruyantes, à la notion qu'elle est à sa place quand l'enjeu est gros.

«C'est parti de là et maintenant je suis ici comme championne», dit-elle avec le sourire.

La route n'a pas toujours été favorable, par contre. Elle a accédé à une demi-finale à Wimbledon en 2012, mais depuis, elle n'était pas retournée à cette étape en Grand chelem avant l'Australie, cette année.

Monica Puig l'a battue en finale à Rio et Pliskova l'a vaincue en match ultime à Cincinnati, où une victoire aurait fait d'elle la reine de la WTA. L'honneur s'est concrétisé quand Pliskova a défait Serena Williams en demi-finale, à Flushing Meadows.

La pression évacuée, Kerber a donc pu arriver sur le court fort détendue, samedi.

Après sa victoire, elle s'est remémorée quel était son plus grand talon d'Achille à l'adolescence, quand elle rêvait de grandes victoires.

«Mon niveau de conditionnement était pitoyable», a-t-elle dit en riant.

Elle manquait d'énergie dans les matches de trois sets. Elle redoutait les grandes chaleurs. Elle peinait à se déplacer.

Samedi, personne n'aurait soupçonné ce passé. Kerber courait avec fougue sur toutes les balles, pimpante dans une troisième manche disputée avec beaucoup d'humidité.

«Dix ans plus tard, je n'ai jamais été aussi en forme, a dit Kerber. Je peux me déplacer à l'infini sur le terrain.»