«Personne n'est parfait», tranche Eugenie Bouchard.

N'empêche, se qualifier pour les quarts de finale de Roland-Garros en battant une joueuse du top 10 mondial en 51 petites minutes sur le court central, ce n'est pas très loin de la perfection.

Que son jeu ait frôlé ou pas l'excellence, l'athlète de Montréal a vaincu l'Allemande Angelique Kerber, 9e raquette mondiale, en deux manches de 6-1 et 6-2, dimanche, en huitième de finale à Roland-Garros. Il s'agit de sa première victoire en tournoi du Grand Chelem contre une joueuse du top 10 mondial, après trois défaites, dont une contre cette même Kerber aux Internationaux des États-Unis l'an dernier. «J'ai confiance en mon talent, je sais que je peux jouer contre les meilleures joueuses au monde, a assuré la joueuse de 20 ans. Mentalement, j'étais prête à livrer un gros combat.»

Dominante d'entrée de jeu, Eugenie Bouchard a mis son adversaire - pourtant l'une des meilleures joueuses du circuit en fond de terrain - sur la défensive en fond de terrain grâce à ses coups d'attaque; elle s'est ainsi forgé une confortable avance de 5-0 à la première manche. Le jeu s'est resserré en début de deuxième manche, mais la 16e raquette mondiale a brisé le service de son adversaire pour prendre l'avance 2-1. L'Allemande a obtenu sa première balle de bris du match au jeu suivant, mais Eugenie Bouchard a fermé la porte avec un coup gagnant du revers. Angelique Kerber n'aura pas eu d'autre chance de briser le service de son adversaire au cours de ce match expéditif.

«Elle a très bien joué et je n'ai pas sorti mon meilleur tennis aujourd'hui. Je ne sais pas ce qui s'est passé, j'ai fait tellement d'erreurs, et mes déplacements n'étaient pas très bons non plus», a dit Angelique Kerber, dont le service est le talon d'Achille. Dimanche, son service était en moyenne 16 km/h moins rapide que celui de Bouchard.

Du côté d'Eugenie Bouchard, difficile de faire mieux sur papier: 30 coups gagnants, 11 fautes directes, 89% de points gagnés sur sa première balle de service, 53% sur sa deuxième balle. Mais la 16e raquette mondiale n'était pas complètement satisfaite pour autant. «J'ai fait quelques fautes bêtes à quelques reprises, dit-elle. J'aurais pu mieux retourner son service et j'aurais certainement pu mieux servir. (...) Il faut que je m'améliore tous les jours. (...) Si je n'avance pas, je vais reculer.»

Malgré ses succès aux Internationaux d'Australie et son premier titre en carrière à Nuremberg la semaine dernière, cette victoire décisive contre Angelique Kerber est peut-être son meilleur match de l'année, voire en carrière chez les pros. «Depuis le début de l'année, j'ai le sentiment que mon jeu a vraiment progressé. Je le ressens à l'entraînement et en match. Même si je ne suis pas à mon meilleur niveau tout le temps, je sais que je peux jouer beaucoup mieux», dit Eugenie Bouchard, qui porte ainsi à 3-3 sa fiche contre le top 10 mondial cette année.

Une odeur australienne

En quart de finale mardi, Eugenie Bouchard, 18e tête de série, partira favorite contre Carla Suarez Navarro, 14e tête de série. À leur seul duel, l'Espagnole de 25 ans l'a éliminée l'an dernier à Wimbledon, en deux manches. Avec une victoire demain, Eugenie Bouchard serait la seule joueuse du circuit féminin à atteindre le carré d'as des deux premiers tournois du Grand Chelem de la saison.

Si Bouchard veut se concentrer uniquement sur son prochain match de quart de finale, le scénario commence à ressembler sérieusement à celui des Internationaux d'Australie.

Deux différences, toutefois, par rapport à l'Australie. Primo, «l'armée d'Eugenie», ces partisans qui lui offrent des animaux en peluche après ses victoires à Melbourne, s'est faite plus discrète à Paris. «Je me demande un peu quand les fans de l'armée d'Eugenie vont se pointer, dit-elle en riant. Peut-être que je dois atteindre la finale. Je trouve ça cool d'avoir des partisans comme ça et j'espère que ça va continuer. Allez, les Parisiens!»

Ensuite, Eugenie Bouchard dit «avoir vieilli» depuis le tournoi australien. Bien sûr, sa vie a changé depuis qu'elle est devenue l'une des jeunes vedettes du tennis féminin, mais elle fait plutôt référence à son 20e anniversaire de naissance en février, une date qui semble l'avoir marquée. «J'ai eu 20 ans il y a trois mois et je me sens vieille, dit-elle en souriant. Je pense que je commence à avoir des rides au visage. Est-ce que j'en ai? Je veux devenir la meilleure joueuse de tennis possible le plus vite possible, parce qu'un jour, je vais me réveiller et avoir 30 ans...»