Le débat fait rage cette semaine à Toronto, même si personne n'ose vraiment en parler avec le principal intéressé.

Le règne de Roger Federer est-il terminé? Le vainqueur de 16 tournois du Grand Chelem pourra-t-il jamais en remporter un autre? Gagnera-t-il même un autre tournoi?

On devine que les réponses à ces questions varient beaucoup selon qu'on soit un admirateur inconditionnel du Suisse ou qu'on préfère Rafael Nadal et les autres prétendants à sa couronne. Il est aussi évident que la grande classe de Federer teinte les jugements de plusieurs, personne n'osant le dénigrer trop ouvertement.

Il faut toutefois se rendre à l'évidence: Federer connaît présentement sa moins bonne saison depuis 2003, l'année de sa première victoire à Wimbledon. Et à moins qu'il ne remporte l'Omnium des États-Unis dans un mois, il terminera la saison à son plus mauvais rang (3e) depuis 2002.

Après une saison 2009 de rêve, ponctuée notamment par un premier titre à Roland-Garros, Federer n'a remporté qu'un titre cette saison, son 16e majeur, en janvier en Australie. Depuis, il n'a atteint que deux finales et s'est incliné nettement devant le Tchèque Thomas Berdych sur son gazon à Wimbledon.

Federer n'a aucun doute

Le déclin semble évident, mais est-il irréversible?

Federer n'a aucun doute. «Je n'ai pas connu la saison que j'aurais voulu, c'est vrai, a-t-il déclaré hier en conférence de presse. Ne pas défendre mes titres à Roland-Garros et à Wimbledon m'a attristé, mais Soderling et Berdych ont bien joué et, moi, je n'étais pas au top physiquement.»

Le Suisse a révélé après Wimbledon qu'il avait souffert d'une infection aux poumons et de blessures au dos et aux jambes au début de l'été. «C'est dommage parce que j'avais vraiment bien amorcé la saison en Australie, en jouant l'un des meilleurs tennis de ma carrière. Je suis triste, déçu, mais je n'ai aucun doute sur ma capacité à revenir au sommet.»

Federer s'est étonné de la rapidité avec laquelle on l'avait «enterré». «J'ai quand même remporté trois tournois du Grand Chelem en moins d'un an et demi. J'ai aussi repris le premier rang du classement mondial après l'avoir perdu. Le faire à nouveau dans les prochains mois constitue pour moi une grande source de motivation.»

Des ajustements

C'est justement pour «revenir devant la meute» que Federer s'est adjoint les services d'un nouveau conseiller en la personne de Paul Annacone. «Cela fait trois semaines que nous travaillons ensemble et il m'apporte un regard différent pour effectuer les ajustements nécessaires à mon jeu», a expliqué le joueur qui a eu 29 ans dimanche.

«Malgré les succès, j'ai toujours cherché à m'améliorer. J'aime bien que mes entraîneurs me critiquent et m'aident à trouver les points faibles de mon jeu. De Peter Carter à Severin Luthi, j'ai eu la chance d'avoir d'excellents entraîneurs depuis mes débuts. J'espère que Paul pourra m'aider lui aussi, tout en continuant de travailler avec Severin.»

Après des vacances en yacht sur la Méditerranée, Federer et sa famille ont passé trois semaines à la maison en Suisse.

«Cela m'a fait du bien de faire le vide loin du tennis et des médias, a-t-il reconnu. Cette pause m'a aussi donné l'envie de revenir et je suis excité à l'idée de retrouver le circuit. Mon corps ne me dérange plus et je me suis très bien entraîné depuis trois semaines. Je me crois prêt pour la fin de la saison et pour tous ces tournois que j'aime beaucoup, comme l'Omnium des États-Unis, le tournoi de Bâle en fin de saison, Paris-Bercy et d'autres aussi.

«Et aussi ici, à Toronto. J'ai déjà gagné la Coupe Rogers et j'aimerais le faire à nouveau cette semaine. Le premier match (ce soir contre l'Argentin Chela) sera plus délicat parce que c'est toujours difficile de revenir après six semaines. Mais si je passe les deuxième et troisième tours, tout sera possible.»

Contrairement à ses rivaux, Federer n'est pas du tournoi de double à Toronto. «Je préférais me concentrer sur le simple avec l'arrivée de Paul dans mon équipe, a-t-il expliqué. Rafael m'avait déjà proposé de jouer avec lui, il y quelques années, mais je jugeais que notre rivalité était trop forte à l'époque.

«Ce serait différent aujourd'hui et j'accepterais volontiers de le faire, même si j'aime faire équipe avec d'autres joueurs suisses pour aider le tennis de notre pays.»

Conscient de son statut, fier de son palmarès, Roger Federer rêve donc toujours d'autres conquêtes.