Même si Jean Pascal parle «de l'envoyer à la retraite», même s'il est négligé et même si les doutes persistent depuis la débâcle contre Carl Froch, Lucian Bute et son clan croient en leurs chances de gagner samedi soir au Centre Bell.

La clé du succès, selon l'entraîneur du boxeur, sera «de se faire respecter». Lucian Bute devra non seulement passer la tempête des premiers rounds, mais rapidement faire mal à Pascal pour lui enlever l'envie d'envoyer des coups de poing.

«Il faut que Lucian se fasse respecter. Il faut amener Jean Pascal dans une zone qu'il n'aime pas. Jean Pascal est souvent désorganisé dans un ring», analyse Stéphan Larouche.

Pascal et Bute vont croiser les gants samedi dans le combat local le plus attendu depuis les trois affrontements entre Dave Hilton et Stéphane Ouellet, il y a 15 ans.

Même si la plupart des connaisseurs penchent pour Pascal, tous s'entendent pour dire que l'issue du duel est difficile à prédire. Les deux boxeurs sont d'anciens champions du monde. Les deux ont leurs forces et leurs faiblesses.

Selon Stéphan Larouche, son poulain a de meilleures capacités cardiovasculaires et lance plus de coups que Jean Pascal. Bute devra donc survivre aux premiers rounds pour ensuite prendre le contrôle du combat.

«Jean Pascal est un boxeur de quatre rounds. S'il veut gagner ce combat-là, il est mieux de faire du dommage dans les quatre premiers rounds, prévient Larouche. Lucian a une énergie exceptionnelle. Lucian le sait. Il sait qu'il peut boxer à haute intensité pendant 12 rounds. Alors je pense que l'issue du combat se joue dans les quatre premiers rounds.»

Durant ces rounds initiaux, Lucian Bute sera «alerte et présent», martèle Larouche, pour s'assurer de ne pas subir le même sort que lors du combat contre Carl Froch. «Lucian veut tellement. Il a tellement hâte de monter sur ce ring-là. Il me l'a dit dans ces mots, raconte-t-il. Ça, pour un entraîneur, c'est une phrase incroyable à entendre.»

Enterrer Carl Froch

Si le clan Bute s'attend à des premiers rounds orageux, c'est qu'en boxe, le passé est souvent garant de l'avenir. Le 26 mai 2012, à Nottingham, Lucian Bute a subi une lourde défaite en cinq rounds aux mains de Carl Froch. L'Anglais avait bondi sur sa proie comme un lion sur une gazelle.

Depuis ce dur revers, le seul de sa carrière, Lucian Bute (31-1, 24 K.-O.) a vu pâlir son étoile. Les doutes sur son talent se sont multipliés; doutes sur son menton, sur sa capacité à réagir sous la pression, et même des doutes sur son appartenance à l'élite de la boxe. Un combat retour victorieux mais difficile contre le modeste Denis Grachev n'a pas rassuré grand monde.

Lucian Bute était considéré comme l'un des meilleurs boxeurs de la planète avant le 26 mai 2012. Qu'en est-il aujourd'hui? Dur à dire. Un ancien champion sur le déclin? Un grand boxeur victime d'un coup du destin? Un athlète de 32 ans à la veille d'un retour? Peut-être un peu de tout ça.

Lundi, Lucian Bute a tenu un entraînement public pour mousser le combat de samedi. Même chez ses fans qui s'étaient déplacés, on sentait l'ombre de la défaite contre Carl Froch.

«Moi, je prends pour Bute. Je n'aime pas Pascal du tout. C'est toujours "je, me, moi" avec lui, a expliqué Serge Malo, qui avait pris du temps à l'heure du midi pour voir Bute s'entraîner. Mais je pense que Pascal va gagner. C'est plate de même!»

Le combat de samedi soir est en quelque sorte une planche de salut pour Lucian Bute. Une victoire contre Jean Pascal (28-2-1, 17 K.-O.) relancerait sa carrière. Elle rangerait la défaite contre Froch dans la catégorie des mauvais accidents. Elle ferait taire ses détracteurs. Elle rassurerait ses admirateurs.

Stéphan Larouche y croit. «Il a plus d'expérience aujourd'hui. Il a pris de l'expérience avec la défaite contre Carl Froch. Il a goûté à des choses auxquelles il n'avait jamais goûté. Il est allé dans une eau plus creuse que jamais auparavant. Il sait que ce n'est pas le fun. Et il sait maintenant comment réagir quand ça arrive.»

Alors, comment Lucian Bute réagira-t-il si Jean Pascal l'accueille dans le ring comme l'y a accueilli Carl Froch? «Soit il s'écrase, un peu comme on l'a fait à Nottingham, lance Larouche. Ou il mord dans son mouthpiece. Maintenant, il le sait. Ça, ça va lui servir.»