Georges St-Pierre affronte Johny Hendricks samedi soir à Las Vegas. Mais il se bat aussi contre Anderson Silva pour le titre de plus grand athlète de l'histoire de l'UFC. Il se bat pour marquer l'histoire à jamais. Tout ça à cause d'un coup de foudre à l'âge de 15 ans.

St-Pierre pourrait pulvériser trois records de l'organisation samedi soir: celui du nombre de victoires (18), celui du nombre de victoires en championnat (11) et celui du temps passé dans l'octogone (5h 2 min 51 s).

Lorsqu'on le lui mentionne, St-Pierre sourit. «J'aime les statistiques, dit-il. Je sais que plus tard, quand j'aurai pris ma retraite, je vais revenir sur mes records.»

Comment expliquer le parcours hors norme du «petit gars» de Saint-Isidore? Par sa volonté hors du commun, selon le président de l'UFC. «Il y a une tonne de gars bourrés de talent, mais qui n'ont pas la moitié de sa force mentale, croit Dana White. Il est carrément obsédé à l'idée de défendre son titre.»

«Quand tu es aussi riche que Georges St-Pierre, c'est presque impossible de garder cette volonté, ce désir, cette passion pour la victoire, croit White. Voilà ce qui le distingue de tous les autres. Et il est riche. Il est très riche, croyez-moi.»

D'autres auraient remporté la ceinture, fait un million ou deux, puis se seraient effondrés. Ils auraient craqué devant la rigueur des camps d'entraînement, des soupers sans verre de vin, des week-ends sans sortie. Ils se seraient recyclés en entraîneur personnel pour petites stars de la télé québécoise, par exemple.

Pas Georges St-Pierre. Samedi, il va tenter de défendre son titre avec brio pour la 12e fois. Un chiffre effarant. Il a déjà passé cinq heures, deux minutes et douze secondes dans l'octogone. Il en veut encore plus.

Le champion est devenu obsédé à l'âge de 15 ans. C'est là que St-Pierre a connu le coup de foudre. Un ami l'avait invité à un barbecue chez lui. Il avait sorti un enregistrement du premier UFC. «J'ai trouvé ça incroyable, ce que ces gars-là faisaient. Je me suis dit que j'allais faire pareil. Il fallait que je me batte à l'UFC. Je suis devenu obsédé», se souvient St-Pierre.

Il y a toutes sortes de coups de foudre. Celui de Georges St-Pierre a été immédiat, brutal et, plus surprenant encore, durable.

«Je n'avais jamais vu un jeune qui en voulait autant, qui était prêt à en baver comme Georges en a bavé quand il a commencé, raconte son mentor et premier entraîneur, Kristof Midoux. Il avait le talent, bien sûr. Mais ce qui m'a le plus frappé, c'était sa volonté. Il prenait des baffes au gymnase et, le lendemain, il revenait en prendre d'autres.»

Plus rien à prouver?

Le champion des mi-moyens (170 livres) de l'UFC n'a plus rien à prouver. Tout le monde le répète sans cesse. À la télé à la carte, il est le plus grand vendeur de l'UFC. «Il est le plus populaire des combattants», tranche le propriétaire de l'organisation, Lorenzo Fertitta.

Jeudi, Dana White a fait l'éloge de St-Pierre. «C'est le professionnel absolu. Il prend tous ses adversaires au sérieux, a-t-il dit. De tous les combattants qu'on a eus, aucun n'a été aussi professionnel que Georges St-Pierre. C'est le prototype du parfait champion.»

Et quand il a été question de sa possible retraite imminente, White s'est écrié: «Il ne prendra pas sa retraite, c'est de la foutaise», comme s'il cherchait à s'en convaincre lui-même.

Tout semble parfait pour St-Pierre. Seul Anderson Silva, considéré comme le plus grand combattant des arts martiaux mixtes, se dresse devant le Québécois.

Le Brésilien, ancien champion des moyens (185 livres), détient deux records quasi inatteignables, avec 16 victoires de suite à l'UFC et 10 défenses de titre consécutives. St-Pierre en a respectivement 11 et 8.

«Anderson Silva a 38 ans. Il a tellement fait. Dans le sport, le gros truc, c'est de rester invaincu pendant une longue période, a répondu Dana White. Mais si St-Pierre se battait encore trois ou quatre ans, peut-être...»

L'idée doit le tenailler, quelque part dans l'esprit obsessif de St-Pierre, de dépasser Silva, de devenir le plus grand. Comme il en rêvait à 15 ans. Puis il y a l'autre St-Pierre, posé, analytique, celui qui sait qu'un coup de trop, qu'un combat de trop pourraient le laisser diminué à jamais. Celui qui est prêt à passer à autre chose.

Entre les deux, la bataille doit être terrible. Un combat de plus dans la vie de Georges St-Pierre.